Christian Louboutin : l’Exhibition[niste] épopée du Shiva de l’escarpin
Christian Louboutin : l’Exhibition[niste] épopée du Shiva de l’escarpin. C’est le sous-titre que l’on pourrait donner à l’exposition que le palais de la Porte Dorée consacre à l’inventeur de la semelle rouge aussi discret qu’éclectique.
Il y a du Shiva chez Louboutin. On le parie !
Quel mortel doté de deux simple bras pourrait en effet créer des milliers de souliers et les orner de tant de matériaux : plumes, verre, gemmes, coquillages, girafes, clous, peaux, canettes et autre folies peintes à la feuille d’or.
Les naissances du Shiva de l’escarpin
Le dieu du soulier est né 3 fois.
1.En chair, en 1964, dans le 12e arrondissement de Paris où il vit avec son père, sa mère et ses sœurs blondissimes. Lui, seul « basané », évoque l’ailleurs au coeur de cette famille d’origine bretonne.
2. En imaginaire, lors d’une visite de l’ancien musée des arts d’Afrique et d’Océanie proche de la rue Daumesnil.
Le déclic créatif ? Une interdiction. L’image d’un interminable talons aiguille type années 50 barré de rouge pour éviter que les élégantes ne dégradent le fragile parquet. Il dessine avec une presque monomanie cette image qui, répète-t-il encore et encore, l’obsède durant son enfance et son adolescence.
3. En « success story » par un geste fondateur. L’un des bras de Shiva Louboutin saisit le vernis à ongles sanglant de son assistante pour en badigeonner la semelle d’un soulier dont il ne supporte plus les teintes fades. Ce geste est suivi d’un autre. Créer les souliers « Nudes » de toutes les phototypes. Ses coups créatifs attirent d’une part l’attention des mondaines à la recherche d’un soupçon d’excentricité. Caroline de Monaco joue ainsi les maîtresses de réputation, les lanceuses l’alertes fashion. D’autre par l’intérêt du marché anglo-saxon ravi d’avoir un nude, un « chair », cher, mais correspondant aux diverses carnations.
Aujourd’hui Louboutin, le créateur Shiva, est connu du monde entier. Têtes couronnées, top models (Bella Hadid, Zendaya), actrices (Catherine Deneuve, Monica Belluci) affichent le soulier rouge sur les red carpets.
Une exposition entre cabinet de curiosité, célébration et installations
Le palais de la Porte-Dorée propose une exposition divisée en une dizaine de sections qui entendent croiser l’imaginaire du créateur, ses 30 ans de carrière, son admiration des métiers d’art, des coopérations avec des artistes choisis.
L’exposition est aussi un hommage au palais de la Porte Dorée dont les motifs luxuriants et exotiques ont largement inspirés un petit Louboutin Shiva qui y venait en voisin avide de découvertes. Le premier soulier maquereau aurait pour source les poissons de l’Aquarium du musée.
Dès l’entrée le ton est donné : le rouge sensuel et flamboyant. Dans le premier espace des dizaines d’escarpins (rouges) sont épinglés au mur molletonné en monochrome sang. Il y a là un brin de Garcia grande époque.
Au fil des salles on croise des regards.
Ceux des artisans de la Maison du vitrail et de quelques 300 premières créations. Les vitraux déclinent huit clefs de création : la parisienne, le spectacle, la couture, l’art, le voyage, l’artisanat, la sexualité et l’innovation
Ceux d’un palanquin sévillan abritant un soulier entouré dans un escargot géant hommage à Cendrillon dit-on. Le carcatère icy pouvant aussi évoquer Basic instinct.
Ceux des mannequins en cuir signés du duo de designers anglais Whitaker Malem avec la collection des « Nudes« .
Ceux des hollogrammes de Dita von Teese et des Pigalle dans un theâtre du Bhoutan, pays aimé du chausseur qui confie certaines fabrications aux artisans du royaume.
Ceux des souliers fétiches importables et des clichés de David Lynch
Christian Louboutin a également fait appel à l’artiste multimédia néo-zélandaise Lisa Reihana, ( In Puisuit of Venus infected), à la chorégraphe espagnole Blanca, au plasticien pakistanais Imran Qureshi.
Cadeau du maître chausseur, de petits films sur son atelier récapitulant les quelques 100 étapes de confection d’un soulier.
Des souliers par centaines
Des souliers, on en découvre des centaines.
Les pré « talon rouge » -dont le fameux soulier maquereau en cuir matelassé que Louboutin conçoit en suivant inspiration et nouvelle dextérité. Un talent de la main qu’il peaufine chez le maître chausseur sculpteur Roger Vivier ou chez Charles Jourdan qui fournit des grandes maisons de mode).
Les must : celui réhaussé d’un trèfle, porté par Caroline de Monaco au Bal de la rose, le Love hommage à Lady Diana, l’iconique Pigalle -et ses foisonnantes déclinaisons,
Dans alcôves ou vitrines flamboient des bottes joyaux, des « plates » chaussettes.
Bref de quoi faite tomber une shoe addict en tétanie et de griller l’Iphone 11 d’une intagrammeuse.
Un musée imaginaire électrique et exotique
Un musée imaginaire propose de plonger dans l’imaginaire et les influneces du roi du talon qui couvrent la Scène (cinéma, photo, cirque, design, danse) comme les arts non mobiles dont la mode occidentale comme indienne.
Un vase beige et noir rappelle les fondamentaux du palais de la Porte Dorée, des « Dyonisos » black en ballet ou au repos renvoient à la richesse des arts non occidentaux-centrés. Christian Louboutin, grand voyageur, est atteint d' »Égyptomanisme« . Un penchant qui ne s’explique pas seulement par le fait que son père biologique copte.
Le portrait de Farida Khalfa – muse de Jean-Paul Gaultier- par Pierre et Gilles rappelle le temps de la fête au Palace – place to be des années 80- et celui du cabaret.
Esthétique gay, pop art côtoient une pièce de Victoire de Castellane, adorée de Louboutin, ou un tableau classique aux souliers chair qui allongent la jambe.
Après une série de croquis au simple crayon ou agrémenté de pierreries, voici une vitrine qui livre de nouveaux indices sur les inspirations du chausseur. Un canapé Niemeyer aux proportions parfaites comble le goût du créateur pour les courbes. Des robes de plumes et de haute couture prennent la pose près d’une sculpture « la vague éternelle » que le petit Christian admirait aux Champs-Élysées pendant des heures. Confirmation de l’éclectisme louboutinien intégrant les coquillages et les mosaïques traditionnelles ou signées d’artistes reconnus.
Le devise du « maître » : distinguer l’homme de goût de l’esthète qui opère une alchimie entre des « matières » venues de divers univers pour en faire quelque chose de rare dépassent les les cadres du goût ordinaire Mais sans aller trop loin tout de même. Bref un mélange des gens qui sait rester sage tout en se révélant piquant.
Avec son éclectrisme, Louboutin se révèle aussi un Shiva des arts.
Christian Louboutin : l’Exhibition[niste] épopée du Shiva de l’escarpin
Christian Louboutin : l’Exhibition[niste]
Palais de la Porte Dorée
https://www.palais-portedoree.fr/
Related articles
Océanie : le leçon de piano maorie
https://finelife.tv/fr/2019/03/27/oceanie-quai-branly-la-lecon-de-piano-maorie/
Le bottier de Gaultier
https://finelife.tv/fr/2017/06/27/henry-achkoyan-bottier-couture/
Credits photos
Finelife TV
Jean-Vincent Simonet