La Maison des Fragrances : parfum en bulles
La Maison des Fragrances : parfum en bulles. Plongez en BD dans la saga des Capella, une famille de « nez » déchirée entre tradition et big business.
Aussi reptilien que sophistiqué, l’odorat est le plus paradoxal des sens.
Les parfumeurs ont de tout temps su exploiter cette ambivalence. Quand au marché des jus il s’avère, à l’image du sens qu’il sollicite, aussi sauvage que glamour. C’est du moins la thèse défendue par La Maison des Fragrances, la BD d’Eric Corbeyran, Christophe Mot et Piotr Kowalski.
Sur le mode du thriller économique, La Maison des Fragrances met en scène une dynastie de parfumeurs. Les Capella se déchirent dans les salons des Fifi (1) entre deux coupes millésimées comme dans les jungles où se fomentent de sombres trahisons.
Christophe Mot, décrit le monde du parfum comme un univers impitoyable où les coups les plus tordus sont permis pour régner sans partage. Le parfum relève du big business et laisse dans son sillage de forts relents d’une finance plus ou moins véreuse. Approche originale d’un domaine dont l’auteur connaît toutes les ficelles puisqu’il a notamment participé à l’élaboration de Black XS le best seller de Paco Rabanne.
Mais la BD initie également le lecteur à l’art du parfum.
L’ambre gris (le « vomi » de cachalot ?) et le bois de oud dont l’usage remonte aux Égyptiens décrochent des rôles de premier choix. Des rôles de résistants face aux molécules de synthèses moins nobles mais en plein essort (2). Les planches de la BD s’attardent sur les labo et les entrepôts de la famille Capella, lieux de fabrication et base de diffusion du jus. Bref on ne sort pas néophyte de la lecture de l’album.
Les ambiances plongent dans l’ambiguïté du parfum et la férocité du milieu en alternant les noirs grisés et les dorés trompeurs. La pochette ajoute du mystère avec une femme prisonnière d’un flacon dans un mélange d’ambre, de beiges et de noirs.
Le cadrage appuie sur les ressorts classiques de l’action : tantôt très serré dans les moments de tension tantôt large pour restituer le faste d’une soirée de gala ou l’exotisme d’une plantation. Piotr Kowalski ne ménage pas les effets pour une lecture dynamique : champ, contre-champ, raccord dans l’action, contre plongée … Le dessin, lui, laisse une impression d’inachevé. Dommage.
Une BD à savourer cet été … peut-être du côté de Grasse, ce haut lieu de parfumerie qui a rejoint en 2018 le Patrimoine culturel immatériel de l’Humanité.
La Maison des Fragrances : parfum en bulles
La Maison des Fragrances
Corbeyran – Mot – Kowalski
Éditions Robinson
https://www.hachette.fr/éditeur/robinson
(1) les « Fifi Awards » sont la cérémonie des prix remis aux professionnels du secteur
(2) les organisation internationales jugent certaines matières premières cancérigènes
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