Les somnambules Gilda Piersanti : dolce vita fatale
Les somnambules Gilda Piersanti : dolce vita fatale .À Rome, 25 ans après un drame, les auteurs doivent rendre des comptes. Les avertissements tombent comme des pigeons messagers du pire. Construction de l’intrigue, complexité des personnages et de leurs inter-relations, peinture de la vie romaine font la force de ce polar.
Trois amis d’enfance -Dario, Gabriele, Massimo- ayant suivi trois chemin différents reçoivent chacun un avertissement : un incident de voiture, un pigeon mort tombant sur une table et l’enlèvement de la fille de Gabriele.
Gilda Piersanti manie signes et symboles. 3.3.3, une troïka, une trinité frappée par un dieu vengueur.
Un dieu en l’occurrence très humain qui réclame une confession pour un crime commis 25 ans plus tôt par les trois amis. Un crime jamais avoué jamais jugé. Un silence au nom des liens de l’amitié.
Des personnages en miroir
L’auteur s’insinue dans les mécanismes de cette amitié pour en décrypter les faillies : subordination, fascination, manipulation. Entre haine et fusion, l’amitié bancale va conduire à un nouveau drame.
Dario, aujourd’hui ministre de l’intérieur compte sur son emprise pour préserver le secret et sa carrière. Massimo, l’entrepreneur, est prisonnier de son désir de reconnaissance, d’effacement de l’image de maillon faible de la troïka. Gabriele, le médecin, oscille entre la préservation de l’amitié, de sa réputation. et la volonté d’avouer afin de sauver sa fille Flora.
Tous trois sont dans le déni, parlent de bêtise de jeunesse. Ils avaient 18 ans lors du drame dans la station balnéaire de Santa Marinella. Un déni que Gilda Piersanti rapproche du somnambulisme.
« Nous sommes des somnambules, nous ne savons pas si le réveil nous apportera la joie ou le tourment, si peu dépend de nous »
Le somnambulisme s’applique aussi aux ravisseurs. La commanditaire, toute en haine aveugle, refuse le deuil et l’éveil à une autre vie. Elle est le pendant de Dario, le tout puissant et aussi l’initiateur du drame. Son fils, dans les brumes d’une relation toxique ne peut déchirer le voile des rêves. En quête éternelle de reconnaissance il évoque le Massimo. Enfin le somnambulisme atteint la rescapée qui surfe sur l’horreur.
Rome : dolce vita fatale
Outre la complexité des liens qui unissent les trois principaux personnages et la finesse psychologique dans l’analyse de l’ensemble des protagonistes, le livre est l’occasion d’une (re)découverte de Rome.
Gilda Piersanti, philosophe et auteurE de polars à succès, est franco-italienne. Elle connaît la capitale comme une « native » Elle la scénariste comme une romancière.
Tout d’abord au moment du drame.
C’était l’époque d’une dolce vita adolescente entre Rome et sa côte. Gilda Piersanti restitue les architectures comme l’atmosphère des fêtes.
Plus tard, elle nous ballade entre ruelles et lieux de pouvoir, hôtels en pénurie d’étoile et hotspots de viennoiseries. Elle désigne les intérieurs et dessine les itinéraires de fuite. La ville vibre sous l’intrigue.
Une intrigue qui palpite jusqu’au dénouement. Le drame est horrible et seul le déni ou l’aveu peuvent permettre de vivre avec son poids. Toutefois on pressentait quelque chose de plus atroce. À moins que la part laissée au hasard meurtrier n’ait été inconsciemment voulue. Et là, l’acte de Dario atteindrait un summum de perversion. De quoi faire des membres de la troïka des somnambules à vie.
Les somnambules
Gilda Piersanti
Éditions Le Passage http://www.lepassage-editions.fr
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