André Ostier ou l’élégance en photo

André Ostier ou l’élégance en photo .La galerie Lacoste, dans le cadre de Paris Photo, expose 37 clichés en noir et blanc du photographe des artistes et des fêtes parisiennes.

Henri Cartier-Bresson parlait de l’instant décisif. André Ostier nous évoque plutôt un instant fugace résultat d’une mise en confiance du modèle. Des modèles ultra chics. Artistes et people. Saisis en mode portrait ou dans le tourbillon de fêtes à Paris ou à Venise. Les clichés les plus connus restants Leonor Fini en ange noir sur une gondole, Matisse le regard ailleurs, dans la couleur peut-être, ou encore Marie-Laure de Noailles masque sur les yeux et doigt sur des lèvres ourlées (photo principale).

Une vie dédiée à l’art, la photo, la mode, les fêtes

Le baron de Redé, Palazzo Labia, Venise, 3 septembre 1951

André Ostier nait en 1906 dans une famille de la bourgeoise parisienne. Il s’éteint en 1994 après un ultime défilé. Il y a indéniablement de la constance dans le chic chez André Ostier.

Entre les deux dates, une vie dédiée à l’art, la mode, la photo et les mondanités.

On distingue les années de « formation ». Celles des études à l’École Libre des Sciences politiques, de la rencontre avec Christian Dior. Ensuite la période des premiers pas. Entre 1928 et 1934 il dirige une librairie-galerie avenue de Friedland à Paris : A.L.P ( À La page). Il y expose Le Corbusier et Max Jacob. André Ostier publie aussi ses premiers articles de presse (Le Figaro, Marianne, Vu…). Il y a évidemment une année charnière, 1938, où il achète son premier Rolleiflex et réalise un premier portrait d’artiste : le postimpressionniste Émile Bernard.

Ensuite il voyage avant d’affronter la deuxième guerre mondiale. Prises durant l’occupation ses photographies des statues du parc du château de Versailles entourées de sacs de sable sont publiées dans « Vogue Libération » de janvier 1945, accompagnées d’un poème de Paul Éluard.

À partir de 1939, André Ostier connaît ses « grandes années ». Il flashe le tout Paris, le tout people, les fêtes somptueuses, les défilés et les ateliers.

Un parcours en trois temps comme une valse photographique

André Ostier Intime – exposition galerie Jacques Lacoste

« Nous avons sélectionné les clichés de l’exposition parmi des milliers. Le résultat est un arbitrage entre l’esthétique, les lieux et les personnages » précise Jacques Lacoste. Le directeur de la galerie insiste également sur le rôle des ayants droit et de François de Ricqlès Conseil. André Ostier Intime est la première exposition de la galerie. « Nous sommes connus pour notre mobilier du 20e siècle. Et plus précisément pour nos pièces des années 30 et 50. L’œuvre d’André Ostier fait écho à cette période » poursuit Jacques Lacoste. On découvre en effet dans la galerie des Jean Royère, Max Ingrand, Serge Mouille, Alexandre Noll, Charlotte Perriand, Jean Prouvé …

Les portraits reflets de l’art et de l’intelligentsia au fil des ans

Henri Matisse, Cimiez Nice, 27 mai 1942

La scénographie dessine un parcours en trois temps. Les portraits d’intellectuels et d’artistes, ami(e)s ou relations d’André Ostier. On regarde Matisse, Jean Cocteau ou Prévert. Mais aussi Calder près d’un pendule ou encore Miro comme sur sa toile. Le lien entre les personnages est l’art et l’amour de Paris. Figure tutélaire de Saint-Germain-des-Près, de l’existentialisme et du féminisme, Simone de Beauvoir pose avec ses cahiers devant l’objectif. Niki de Saint Phalle est capturée dans l’atelier. Deux portraits qui introduisent un récit féminin. Plus tard André Ostier capte un David Ockney qui ouvre des yeux de hiboux et un Andy Warhol impénétrable accoudé à un mur. À Paris toujours.

Andy Warhol, Paris, 1982.
David Hockney peignant un portrait de Shirley Goldfarb, Paris, 1975.

La mode entre créateurs, ateliers et défilés

Yves Saint Laurent, chez Christian Dior, Paris, 1959.

André Ostier rencontre Christian Dior très tôt. Rencontre décisive. Le photographe est en effet très investi dans le monde de la mode. Il shoote les ateliers et les maîtres de la couture. Christian Dior père du New Look et du reflet du « Paris capitale de la mode ». Mais aussi Yves Saint-Laurent regard droit vers l’objectif, sage, un rien absent le bras élégamment posé sur le haut d’un canapé. La photo est prise chez Christian Dior.

André Ostier bouscule également les usages. Un peu à l’image de Frank Hortat qui appliqua les codes du photo journalisme à l’univers de la mode en utilisant la lumière naturelle ou encore en interagissant avec des mannequins placés dans des lieux emblématiques et parfois décalés.

Le tourbillon des fêtes

Leonor Fini en ange noir et Fabricio Clerici, Palazzo Labia,Venise, 3 septembre 1951.

Même si l’élégant photographe n’aimait pas le qualificatif de de mondain il incarne le tourbillon des fêtes, des vernissages … La dernière partie de l’exposition foisonne de photos de parties délirantes. André Ostier utilisait un appareil « ventral » qui lui permettait de regarder ses modèles. Ce qui tissait un lien de confiance et restituait ainsi une spontanéité. Idéal pour l’ambiance des fêtes comme pour les portraits.

Costumes, plumes, chapeaux, masques, lieux somptueux, les clichés claquent comme des bulles de champagne. L’insouciance, le vertige du divertissement. Des bals de la « Café Society » (Groussay et Venise) à l’Hôtel de Coulanges en passant par Le Pré-Catalan (Bois de Boulogne) de Marie-Laure de Noailles. Le photographe chronique les jeux de l’aristocratie et de la haute bourgeoisie de l’époque. Il a du Proust chez André Ostier.

INFOS

André Ostier Intime

Galerie Jacques Lacoste
19, avenue Matignon
75008 Paris – France
+33 (0)1 42 89 11 11

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