Exposition Dylan Mooney à l’ambassade d’Australie

Exposition Dylan Mooney à l’ambassade d’Australie .Avec Blak Rainbow l’artiste célèbre l’amour queer aborigène à travers une série d’illustrations numériques résultat de trois années de travail. Une œuvre audacieuse, militante et ultra vitaminée.

On connait l’art aborigène à travers les célèbres peintures sur écorces de la terre d’Arhem ou encore les œuvres des artistes de Papunya, berceau de la peinture aborigène au début des années 70. Dylan Mooney s’inscrit dans une autre veine artistique. Celle du numérique et du “blak” queer qui explore les nouvelles technologies, la visibilité des peuples des Premières nations d’Australie et la question de l’identité.

Instagram a distingué Dylan Mooney. Une publication représentant deux hommes s’enlaçant (photo principale). Ce qui a boosté sa visibilité mais a également déchainé la haine.

Dylan Mooney : Blak art et amour queer

“J’ai grandi dans le nord du Queensland. Il y avait peu de personnes queers aborigènes visibles. Alors j’ai voulu justement interroger le fait d’être queer aborigène” explique Dylan Mooney. “Beaucoup de choses m’ont inspiré. Surtout des personnes que j’ai rencontré et parfois aidé. Des personnes qui sont de différentes identités, de différentes sexualités et qui empruntent le même chemin que moi. Il est essentiel d’augmenter le visibilité de l’amour queer chez les Premières nations australiennes. Le fait que voir quelqu’un qui nous ressemble à une portée inouïe“.

Art numérique et récit des Ancêtres

Né en 1995, Dylan Mooney se revendique artiste des îles Yuwi, de Torres et des mers du Sud. Il se dit fortement attaché à sa communauté qu’il remercie de l’avoir toujours soutenu.

Dylan Mooney est un artiste trans-disciplinaire. Il utilise le numérique mais également le dessin, la sculpture, la gravure et la peinture. “Je reprends les récits de mes ancêtres. J’ai commencé à les raconter à travers des dessins ensuite à travers des tuiles d’aluminium. Ceci après avoir découvert des boucliers traditionnels. Je voulais redonner vie à ces histoires. J’ai donc recréer ces boucliers” raconte l’artiste. “J’ai également utiliser l’ocre de mes terres natales. Cet argile que l’on utilise en poudre permet de créer différentes couleurs comme le sable ou encore le jaune. L’ocre est également une reconnexion à ma communauté, à ma terre et me permet de perpétuer les pratiques culturelles ancestrales.” Le jeune artiste fait également beaucoup de recherches sur les matériaux qu’il utilise. “Je lis des articles d’anthropologues et je m’en inspire. Je me demande : est-ce que c’est cet objet appartient à une communauté, à une cérémonie ?”

Dylan Mooney a débuté dans la création numérique il y a cinq ans. Il suit un processus créatif précis. “Je commence par dessiner sur papier, puis je transfère le résultat sur iPad. Je suis autodidacte, j’ai appris la technique en regardant des tutos sur Youtube. Parfois je me prends en photo pour dessiner les contours des personnages. Je teste aussi les couleurs, la place des plantes, des animaux. J’aime travailler sur Instagram pour avoir l’avis de mes Followers. Quant à mes personnages, c’est un petit peu tout le monde, mes amis, moi, des personnes que je croise“.

Art et environnement

Dylan Mooney questionne aussi le changement climatique. “Je m’interroge sur la justice climatique en particulier dans le détroit de Torres. J’ai été approché par ClientEarth, une ONG qui travaille dans cette région. Car l’élévation du niveau des mers oblige parfois les communautés à partir. Ça m’a tout de suite parlé”. Pour mémoire en 2022 le gouvernement australien a été reconnu coupable par le Comité des droits de l’Homme de l’ONU de ne pas avoir aidé les communautés dans leur combat contre le changement climatique. Il a par ailleurs demandé à l’Australie de dédommager les habitants des îles pour « les préjudices déjà subits, de lancer des consultations sérieuses pour déterminer leurs besoins et prendre des mesures pour sécuriser l’existence sur leurs îles respectives ».

Une exposition vitaminée

L’exposition proposée par la National Gallery of Victoria présente trois ans de travail de cette nouvelle et audacieuse voix de l’art aborigène.

Couvrant l’ensemble du rez-de-chaussée de l’ambassade d’Australie elle suit un parcours où alternent et s’intriquent l’amour queer et la flore du Queensland. Animaux et plantes se retrouvent d’ailleurs dans beaucoup de toiles qui fourmillent de détails. Les titres des œuvres sont indéniablement poétiques et militants : de “Resist” à “Amour digne” en passant par “And then lilfe was beautiful”.

On distingue quelques thématiques comme les Super héros Blak, la flore ou encore les mythes ancestraux et leurs créatures notamment un serpent géant.

Côté couleurs, les teintes sont vibrantes, pétillantes, saturées. Les personnages, eux, sont définitivement figuratifs, stylisés. Une sorte d’art naïf à travers l’art numérique. Parfois de “cyber futurisme aborigène”. Parfois encore les œuvres diffusent un petit air de kitsch version Pierre et Gilles du détroit de Torres.

Au-delà d’une facilité apparente, l’œuvre est Dylan Mooney est riche, complexe et nécessite attention et grille de décryptage.

INFOS

Blak Rainbow Dylan Mooney une exposition de la National Gallery of Victoria

Ambassade d’Australie 4, rue Jean Rey – 75015 Paris (Entrée rue de la Fédération pendant les travaux)

Du 16 novembre 2023 au 24 mai 2024

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