Précieux déchets pour la mode et le design
Précieux déchets pour la mode et le design . L’exposition de la Cité des sciences et de l’industrie alerte sur les coûts du tout jetable et invite à changer nos comportements. Mais elle pose aussi un autre regard sur les quelques 2 milliards de tonnes de détritus produits chaque année. Alors de la chaise arty en frigidaires recyclés aux vestes en varech en passant par des tableaux compactant de la vaisselle Mac Donald, voyage dans un monde où les rebus deviennent des objets de désir.
En pleine Cop28 et à la veille des libations de Noël et du Nouvel An, la Cité des sciences et de l’industrie poursuit ses efforts pour alerter sur l’urgence d’une sobriété créative et bien comprise. Elle l’a déjà fait avec l’exposition Urgence climatique puis avec Ville de demain. Elle continue avec Précieux déchets. Cette fois-ci en tentant de changer notre regard. En faisant des détritus les objets de désir. Au moment où la société de consommation s’emballe encore avec la montée en puissance des classes moyennes du Grand Sud. Et les trop petits pas des consommateurs occidentaux.
L’exposition suit un parcours en trois temps. D’abord le coût des déchets, ensuite leur potentiel et enfin l’apparition de nouveaux modes de vie.
Le désir du jetable
En ouverture une installation faite de milliers de bouchons ramassés sur la plage par des habitants de Cornouailles. C’est joli, hyper coloré et ça ressemble à un totem. La sculpture est à l’image du plastique. Attirante et envahissante.
Dans les années 50, l’avènement de la société de consommation s’accompagne d’un changement de comportements et de désirs. Le plastique, pratique et facile à produire, devient vite indispensable. À côté de la sculpture de bouchons, un petit podium avec des couches et de la vaisselle jetables, des biberons, des seringues. Tout devient plus facile. Et il est difficile de se détacher de la facilité. Pour le plastique comme pour le reste. Surtout quand on n’en voit pas le danger et surtout aussi quand l’économie repose sur le jetable né après la crise des années 30.
Au mur on découvre ainsi un article du journal Le Monde et une condamnation pour obsolescence programmée. Car les glorieuses années, comme plus tard les moins fastes, instaurent et perpétuent un nouveau paradigme. Terminée l’économie circulaire place au toujours plus nouveau. Du design d’un smartophone à la fast fashion. L’Europe et les États-Unis portent le tonneau des Danaïdes de désirs sans fin.
Cet emballement a bien sûr un coût. Sur l’environnement, sur la santé des humains et des animaux, sur la planète en général. Car évidemment les déchets polluent. Notamment les océans et la faune aquatique avec le plastique.
Les chiffres et des déchets
2 milliards de tonnes de détritus par an sont générés dans le monde. Seuls 15 % sont valorisés.
92 millions de tonnes de déchets textiles sont produits annuellement. Une augmentation de 60 % est prévue chaque année d’ici 2030.
Plus de 350 millions de tonnes de plastique sont générés chaque année dont 40 % utilisés une seule fois. 19 millions de tonnes d’objets plastiques à usage unique sont fabriqués par an. On compte 7 milliards de tonnes de déchets plastiques produits à ce jour dans le monde.
En 2020, 50 millions de tonnes de déchets d’équipements électriques et électroniques ont été produits. Seulement 20 % sont officiellement recyclés. Cette catégorie est celle qui augmente le plus vite en Europe passant de 7,6 millions de tonnes de en 2007 à 12,4 en 2020.
1,3 milliard de tonne de nourriture est gaspillée chaque année dans le monde
L’histoire de l’industrialisation et celle des déchets s’affichent aussi sur les murs. Entre l’invention des toilettes publiques en 1775 et le début des années 2 000. On peut ainsi lire que la production mondiale de déchets a davantage augmenté pendant la première décennie du XXIe siècle qu’au cours des 40 années précédentes.
Les déchets : nouveaux objets de désir
Tout n’est pas à jeter. L’expo « Précieux déchets » montre des déchets recyclés qui deviennent désirables en version chaise, lampe, miroir ou encore en vêtement avec des fashion designers pionniers comme Stella McCartney.
Des créateurs qui imaginent des vêtements ou des meubles à partir d’algues, de betterave, de coquillages mêlés ou non à du plastique recyclé, à des déchets industriels.
Mais aussi des artistes qui créent à partir de vieux smartphones ou de plats et de gobelets Mac Donald.
Côté construction on trouve notamment de nouveaux revêtements en maïs et des maisons en liège ou en matériaux industriels recyclés. Une manière aussi de renouer avec les savoirs traditionnels.
« J’ai été scotchée par la beauté de certains objets. On voit l’élégance, la sophistication alors que les matériaux sont des déchets » admet la commissaire Dorothée Vatinel. Là, devant une colonne de gobelets digérés par des champignons avec comme résultat une pâte biologique qui sert aux constructions.
On s’étonne aussi devant une table en cheveux. En fait conçue à partir de résidus d’agave. Et aussi face à la vaisselle et au film « plastique » en algues NOTLA.
« Il faut passer de l’obsolescence programmée à la pérennité programmée » rappelle Dorothée Vatinel qui insiste sur l’importance des nouveaux circuits de récupération. Et sur les modes de consommation. À vos ordinateurs recyclables et vos ampoules démontables.
Les scolaires commentent. Avec une conscience écologique sélective. Par exemple : « Je l’ai vu boire de l’eau du robinet. Ça m’a donné envie de gerber. Sérieux ! Mais là les trucs berlingots fluo et les plats franchement c’est trop bien vu ! »
INFOS
Exposition Précieux déchets
Cité des sciences et de l’industrie
Du 5 décembre 2023 au 1 septembre 2024
Ouverture de 10 h à 18 h du mardi au samedi et de 10 h à 19 h le dimanche
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