Livre Oser le nu le female gaze
Livre Oser le nu le female gaze. Camille Morineau dans un essai érudit abondement illustré explore quatre siècles d’histoire de l’art à la recherche d’un regard féminin.
Au Centre Pompidou, l’exposition Suzanne Valadon interroge notamment le regard des femmes sur le nu masculin et féminin. Les toiles de l’artiste reflètent une approche du corps sans idéalisation, ni érotisation. Par ailleurs ses nus d’homme abordent les sexes. Plus tôt, au XVIIe, siècle Artemisia Gentileschi, l’une des peintres caravagesques les plus connues, peint « Suzanne (nue) et les vieillards », un grand nu « Allégorie d’inclinaison » ou encore Danaé. Dans Judith décapitant Holopherne, c’est un homme qui se trouve nu et vulnérable.
Female gaze
Pendant longtemps les femmes artistes n’ont pas eu directement accès aux modèles ou aux écoles. Mais elles avaient accès à la culture et aux ateliers. Et elles ont bel et bien peint des nus. Alors y-a-t-il une female gaze ? À travers d’abord des détails puis des combats et surtout un accès direct au corps, le leur ?
Oui répond Camille Morineau dans son ouvrage Osez le nu Le nu représenté par les femmes artistes. Commissaire et conservatrice elle est aussi co-fondatrice de AWARE (Archives of Women Artists, Research and Exhibitions) l’association qui vise à replacer les artistes femmes du XXe siècle dans l’histoire de l’art. Camille Morineau a travaillé pendant 2O dans les plus grands musées. Notamment au musée national d’Art moderne (MNAM) où elle a dirigé l’exposition « elles@centrepompidou ».
« Dans cet essai je réponds à la question qui m’a été régulièrement posée au printemps 2009 par des journalistes et des visiteurs de l’exposition. Pourquoi y a-t-il si peu de nus d’hommes parmi ces œuvres d’artistes femmes ? » précise l’autrice en introduction du livre.
En regard, une œuvre des Guerrilla Girls qui demande « Do women have to be naked to get into the Met.Museum ? »
D’une manière générale Camille Morineau questionne « N’est-ce pas nous, collectivement, qui n’avons pas su, et ne savons toujours pas, regarder le nu vu par les femmes ?
Quatre siècles de nus
L’autrice explore alors quatre siècles d’histoire de l’art. Du XVIe au XXe siècle. Une plongée vertigineuse qui déplace le regard et fait passer les femmes de modèles (sujets représentés) à artistes (sujets représentants).
Dans son essai très érudit Camille Morineau convoque des icônes. Hildegarde von Bingen, Artemisia Gentileschi, Imogen Cunningham, Paula Modersohn-Becker, Suzanne Valadon, Amrita Sher-Gil, Tarsila do Amaral, Faith Ringgold, Martha Rosler, Cindy Sherman, Louise Bourgeois, Alice Neel. En couverture la fantastique photo Dawn d’Alice Boughton. Un nu à la pomme de dos.
La palette des thèmes est très variée. De la mort à l’érotisme notamment. Eros et thanatos. Avec cette double page qui en met en écho une scène d’amour dessinée par Käathe Kollwitz et le troublant Sorg et ses deux femmes près d’une croix d’Anna Ancher. Ou encore, toujours de Käathe Kollwitz, les nus morts, souffrants et christiques du prolétariat. Camille Morineau montre des sexes d’homme en repos (Leonor Fini Portrait de Nico) ou en érection (Orlan l’Origine de la guerre, Nan Goldin Body Masturbating). Des vagins aussi. Et des regards LBGBT, féministes et noirs (Celeste Woss y Gil, Tarsila do Amaral, Faith Ringgold) sur le nu.
Chaque nu peint par une artiste femme reflète l’époque. Une époque qui parfois oublie. C’est ce que rappelle Camille Morineau. L’histoire a oublié les femmes artistes célèbres dans leur siècle.
INFOS
Osez le nu le nu représenté par les artistes femmes
Camille Morineau
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