Chiharu Shiota fait trembler les âmes au Grand Palais
Chiharu Shiota fait trembler les âmes au Grand Palais . Sur 1 200 m2 la plus grande monographie dédiée à l’artiste japonaise en France tire les fils de la tisseuse de mondes en neuf installations immersives, des tableaux, photos, sculptures et vidéos. Un voyage, un tissage métaphysique monumental entre vie, mort et néant, en trois couleurs et sur fond de musique lyrique, c’est l’empreinte que laisse l’exposition Chiharu Shiota The Soul Trembles au Grand Palais.
Au début le vide peut être avec une installation de volumes textiles qui pend en une pluie blanche dans l’escalier depuis le plafond. Il y a quelque chose de suspendu, le temps, l’espace. Restent l’entre deux, le rêve et la beauté ou encore l’idée d’un nouveau départ. « Where are we going » est en fait une assemblage de barques semblables à des ailes blanches enserrées dans des fils blancs.
Le filet réseau
Ensuite Uncertain Journey (photo principale) une immersion matricielle dans des kilomètres de réseaux-vaisseaux rouges (photo principale). « Ces structures ont parfois été comparées à l’exposition « First Paper of Surrealism » conçue par Marcel Duchamp à New York en 1942. Les filets de Shiota peuvent également apparaître comme une métaphore des réseaux de transport et de distribution qui se sont développés à l’échelle mondiale, ou de ces autres réseaux qui prolifèrent à l’infini à notre époque post Internet » estime la commissaire de l’exposition Mami Kataoka. Les filets évoquent aussi les liens, des vaisseaux sanguins aux relations territoriales en passant par les liens du sang. Tandis que les bateaux symbolisent le voyage et les migrations contemporaines.
La mort et le frémissement des âmes
Enfin il y a la mort en noir qui englobe dans un infini de laine des objets de vie et d’art dont un piano. Ce piano est le souvenir d’un événement traumatique. Celui d’un incendie dans la maison d’un voisin alors que l’artiste avait 9 ans. Le piano brulé est un rescapé.
Le thème du traumatisme comme celui de la mort et de la présence dans l’absence est récurrent chez Chiharu Shiota. L’artiste, qui se bat contre un cancer, questionne le corps fait d’atomes recyclables et la survie de la conscience. « The Soul Trembles » est une description exacte de son moi intérieur confronté à une anxiété insondable qui perturbe sa sensibilité » explique la commissaire de l’exposition Mami Kataoka. Au-delà des mots, l’artiste japonaise espère une connexion basée sur l’empathie et la résonance entre les « âmes ».
Un monde tremblant
Chiharu Shiota (Osaka 1972-) joue avec les symboles -barque, valise, jouet- qu’elle enveloppe dans des toiles d’araignée, étale en collection ou suspend. Depuis les années 90, l’artiste crée des installations monumentales avec des fils. Le déclencheur : l’instabilité. Alors étudiante en peinture, elle déménage en effet beaucoup. Neuf fois en trois ans. « Il m’arrivait de ne plus savoir où j’étais en me réveillant le matin. J’ai pris du fil que j’avais dans ma chambre et j’ai commencé à tisser une toile autour de mon corps et de mon lit. J’avais l’impression de dessiner dans ma chambre. Je crée une peinture en trois dimensions et, en même temps, c’est un miroir de mes sentiments » confie-t-elle.
Une artiste multidisciplinaire
La musique est aussi très présente dans cette exposition qui montre photos et vidéos des installations en décors d’opéra. Côté opéra Le crépuscule des dieux, Siegfried, Tristan et Isolde mais aussi Œdipe roi de Stravinsky et Matsukaze de Toshio Hosokawa.
L’exposition propose aussi des photos et des extraits de vidéos des spectacles. Des tableaux et des sculptures, toiles, certaines sanglantes, font écho au monde de la plasticienne. The Soul Trembles expose par ailleurs le vêtement considéré par Shiharu Shiota comme une autre peau.
Co-organisée avec le Mori Art Museum de Tokyo cette exposition est la plus importante jamais consacrée à l’artiste en France. Elle couvre plus de 20 ans de carrière et s’étale sur 1200 m² des premières galeries rouvertes du Grand palais. On parle de 280 km de laine utilisées pour Uncertain journey et 200 km pour In silence.
Chiharu Shiota en bref
« Née à Osaka en 1972 et résidant à Berlin, Chiharu Shiota est mondialement reconnue pour ses installations monumentales faites de fils de laine entrelacés. Artiste multidisciplinaire, elle a d’abord étudié la peinture à Kyoto avant de se détourner de ce médium. Influencée par l’artiste Marina Abramović, elle explore la performance et l’art corporel. En 1994, elle réalise Becoming Painting, une installation-performance où elle se recouvre entièrement de peinture émaillée rouge. Cette œuvre marque sa transition vers un art qui dépasse la toile pour envahir l’espace » (source Grand Palais).
INFOS
Chiharu Shiota The Soul Trembles
Du 11 décembre 2024 au 29 mars 2025
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