Expo Zhanna Kadyrova à la Galleria Continua
Expo Zhanna Kadyrova à la Galleria Continua. Avec Strategic locations l’artiste ukrainienne nous fait vivre la guerre dans les lieux stratégiques de conflits, questionne les ressources humaines, matérielles, naturelles. Aussi poignant que créatif.
Zhanna Kadyrova est de passage à Paris. De passage simplement. Elle retourne en Ukraine après la présentation de son exposition. Pas de temps à perdre car l’artiste « documente » artistiquement la guerre qui déchire son pays depuis plus de trois ans. Pour Zhanna Kadyrova, née à Brovary (Ukraine) en 1984, l’art, en relayant les voix de ceux qui se battent pour la liberté et l’autodétermination, est un vecteur de résistance. Zhanna Kadyrova expose en Ukraine comme dans le monde entier. Elle vient par ailleurs de remporter le prix Her Art 2025 pour la promotion des femmes artistes. Le prix consacre Refugees, une série de clichés sur les désastres subis par les bâtiments sur la ligne de front. Avec en filigrane évidemment les ravages sur les populations et sur la terre.
En ouverture une installation de 2014, année de l’annexion de la Crimée par la Russie et du début de la guerre au Dombas. Murs écroulés, ustensiles de cuisine répandus au sol. De l’autre côté des briques, un reste de papier peint évoque la vie d’avant. Le Home perdu. Home est aussi une sculpture monumentale qui montre une carte de l’Ukraine fracturée par l’invasion.
Le procédé est un peu la signature de l’artiste qui récupère des matériaux pour donner à vivre la guerre.
Écocide et questionnement sur la nature humaine
Plus loin, Ressources, une autre installation faite, cette fois-ci, de troncs de bouleaux coupés courts et enveloppés d’une écorce en treillis militaire. Réalisée en Transcarpatie, à l’ouest de l’Ukraine, une région relativement éloignée de la zone de guerre, cette œuvre met à la fois en scène les coupes des bûcherons et les corps humains mutilés par la guerre. Le sève et le sang mêlés. Perdus, sacrifiés.
Comment l’homme peut-il perdre son humanité s’interroge l’artiste de zone de front en zone d’écocide.
C’est avec Forest que Zhanna Kadyrova, tisse les liens les plus étroits entre écocide, guerre et destructions des cultures. Construit en 1956, le barrage de Kakhovka avait enfoui sous 2 155 km² d’eau des sites archéologiques ukrainiens, notamment des lieux historiques scythes et des fortifications cosaque. En 2023, le barrage a été détruit par l’armée russe, provoquant des inondations massives et par conséquent la destruction violente des écosystèmes. Zhanna Kadyrova capture en vidéo l’émergence d’une jeune forêt sur le site de la destruction. La nature reprend donc progressivement possession ses droits.
Entre balles et coquillage
L’artiste joue avec tous les mediums ou presque. Ainsi dans Souvenir (2023), « des coquillages – objets souvent collectés par les enfants comme souvenirs de vacances d’été – deviennent des sculptures qui laissent apparaître des images à travers des judas. À travers cette œuvre, l’artiste réfléchit à l’inaccessibilité de certaines régions de son pays envahies par la Russie, notamment l’ensemble du littoral de la mer d’Azov ».
En fin de parcours, la série Shots (2010-2014). Une nouvelle fois des éléments du quotidien, ici des carreaux que l’on peut imaginer être des carreaux de cuisine ou de salle de bain. Des restes de lieux de vie mitraillés par de véritables balles de Kalachnikov. L’impact est beau, l’impact est fort. Sur l’environnement, la psyché et le corps humain. On peut presque entendre le bruit des balles.
INFOS
Zhanna Kadyrova -Strategic locations
28/03/2025 – 28/05/2025
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