Panorama : polar dystopique sur la dictature de la transparence

Panorama : polar dystopique sur la dictature de la transparence. Lilia Hassaine livre un roman orwellien qui dissèque les tendances contemporaines et les poussent à leur extrême. Résultat : une société coincée dans une prison de verre où règnent voyeurisme, rigorisme moral et nouvelles cruautés sur fond d’inégalités et de résistances.

L’impensable s’est passé. La disparition d’un couple et de leur fils à Paxton, le quartier le plus huppé d’une ville aux maisons de verre. Là où tout se voit, où l’intimité disparait sous le regard bienveillant des voisins. Pourquoi en effet avoir peur de montrer si l’on a rien se reprocher ?

Populisme feutré

Hélène, gardienne de protection, enquête. Au fil de ses investigations elle documente les perversions sucrées. Celles qui gravitent autour des promesses de sécurité. La dictature du bonheur, les injonctions des réseaux sociaux, les manipulations de la bienveillance et surtout le populisme feutré.

Tout a commencé par la Revenge Week. Un influenceur au million d’abonnés se venge d’une agression sexuelle prescrite par la loi. C’est alors la curée. Pendant une semaine les citoyens qui s’estiment privés de justice règlent directement leurs comptes. Comme dans les films où l’ultra droite liquide les criminels relaxés ou bien pas assez punis. On pense aussi aux lynchages de foules livrées à elles-mêmes. Au goût populaire pour les exécutions publiques. Ici, c’est une « justice pour moi-même » à l’échelle d’une nation.

Après une amnistie générale vient le temps des réformes. En bref le rejet de la police, de la justice et du politique. Un populisme feutré se met alors en place. La sécurité passe par la transparence totale. Le grand architecte de cette nouvelle dictature est Viktor Jouanet qui construit des maisons de verre. Ultra chics évidemment pour les mieux lotis. C’est une sorte de société téléréalité où chacun joue sa comédie humaine basé sur l’affichage du bonheur et tisse ses névroses. Une société du consentement. Big Brother à l’époque de la bienveillance.

Maisons de verre : vitrines de la nature humaine

L’humain est un animal grégaire. Il aime faire société. À quel prix et jusqu’où interroge le livre de Lilia Hassaine. Hélène qui a utilisé la transparence pour piéger son compagnon dans son intérieur de verre va progressivement se questionner et finir par déconstruire le schéma.

Celui d’une société de la transparence faite d’inégalités et de résistances. Dans ce mode orwellien il y a les classes supérieures qui affichent en vitrine leurs signes extérieurs de richesses et de pouvoir et les classes moyennes qui se copient instaurant un conformisme design autant que moral. Les résistants volontaires et les plus pauvres vivent aux marges. Plus précisément aux Grillons. Hélène y enquête et découvre des vestiges. Des maisons avec des murs qui protègent une intimité, des livres, des photographes transfuges.

La fin est sanglante. Les murs de verre explosent pour mieux se reconstituer.

Panorama sonne comme une mise en garde. La dictature se nourrit de nos consentements, nos renoncements, nos alignements. De nouveaux conformismes nous enferment dans des geôles où derrière un bonheur apparent fermentent des violences qui ne demandent qu’à éclater.

Un roman de la rentrée littéraire à lire absolument !

INFOS

Panorama

Lilia Hassaine

Éditions Gallimard https://www.gallimard.fr/

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