Roman La vague qui vient Daniel Fohr
Roman La vague qui vient Daniel Fohr .Le portrait truculent d’une île et de ses habitants en mode socio-cosmogonie, un concentré d’humour souvent vitaminé parfois très noir.
Sur la couverture, l’illustration évoque la célèbre vague d’Hokusai. Bien vu car dans le livre il est beaucoup question de vagues. Celle dans laquelle plonge une rousse maraichère, la Nouvelle Vague aussi qui a porté l’actrice aujourd’hui recluse dans un château. Et surtout celle qui menace d’emporter la narrateur, auteur de BD à la dérive. Ruiné après l’échec de son album « La galaxie des mille soleils », il part pour la mer et une île moitié méditerranéenne moitie océanique. Là, le maire qui aime faire des vagues, lui commande une fresque pour la salle des fêtes. Le résultat ne sera pas une Sixtine façon Michel Ange revisitée mais une cosmogonie inspirée très très librement des délices et des tortures de Jérôme Bosch ainsi que des cases du 9e art. On y trouve en effet des portraits délicieusement perfides, des allusions amoureuses, le temps, les éléments et la tragédie.
Vague de couleurs et descriptions pointillistes
Avec un peintre et auteur de BD le narrateur doit forcément traquer la couleur. De la queue blanche des lapins aux moustaches rousse d’un faux anglais en passant par les tenues des habitants. Noire pour les Îliens, pastel pour les résidents Secondaires CSP+, acidulée pour les touristes. Un code couleur social. Daniel Fohr ne rate pas non plus les couleurs du printemps, des bleus lins aux bleus lavande, ni celles des autres saisons. Il a le temps. Son personnage met 6 moins à réaliser la fresque. Les teintes des flots et des cieux lui inspirent également une mania du détail.
Car l’auteur décrit tout. En pointilliste obsessionnel. Une sorte de comique de répétition narratif. Dans le registre des lourdeurs on note par ailleurs des « pensées » en filiation directe avec le patrimonial « Un éléphant ça trompe énormément ».
La grande vague du tourisme culturel
Mais le roman est truculent. Dès l’ouverture. Il y a 70 000 ans, quand l’île était une terre sans mer autour et que les Néandertaliens y pratiquaient des expériences gustatives risquées. Aujourd’hui les restes de ces aventures, les fèces, figurent en bonne place dans la sélection des choses à voir absolument lors d’un séjour touristique. Comme la légende du pirate reconverti en homme d’affaires et de son mystérieux trésor. C’est dans le même esprit de découverte culturelle que le maire donne carte blanche à l’Artiste pour redécorer la salle des fêtes. Le tourisme culturel a la vent en poupe. L’Île doit faire face à la vague qui vient.
Mi-figue mi-raisin amer
La BDiste a un figuier dans son jardin habité par les lapins et les chardons. Comme le jardin, le livre est doux comme les fruits et pique comme les ronces. Car, au delà de la socio-cosmogonie, Daniel Fohr peint la solitude et les brisures. Celles de l’auteur de BD, celle du maçon qui se suicide, celles de l’actrice de la Nouvelle Vague défigurée et rongée par ses morts.
La vague qui vient est un concentré d’humour souvent vitaminé parfois très noir.
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La vague qui vient
Daniel Fohr
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