Beau livre Erratum anachronismes à l’écran
Beau livre Erratum anachronismes à l’écran. Julien Magalheas se paie avec humour et érudition les costumes, accessoires et capillaires de 35 blockbusters, films et séries.
Julien Magalheas met de l’ordre dans le vestiaire du cinéma et des séries. À la loupe car, on le sait, le diable se cache dans les détails. L’auteur le fait dans un beau livre à la manière d’un commissaire-détective du Centre national du costume de scène de Moulins (Auvergne) qui aurait le verbe taquin. Une première car il diffuse généralement son expertise piquante sur Instagram et dans la presse.
Erratum, sous-titré « Pour en découdre avec les anachronismes à l’écran » se divise en cinq chapitres. Un choix chronologique. Avec évidemment en premier lieu l’Antiquité puis le Moyen-Âge. Ensuite la Renaissance suivie par les temps modernes et enfin par le monde contemporain.
L’auteur sélectionne des films et des séries qui parlent à tout le monde. Bons ou bidets d’or. De 300 à Vercingétorix en passant par Cléopâtre pour l’époque antique. Ou encore, en mélangeant les époques, Titanic, Les visiteurs, Marie-Antoinette, Dracula. Au total 35 blockbusters.
Histoire de mode, de mœurs et de rire
Erratum plonge dans le cinéma comme dans l’histoire de l’art, de la mode et dans l’histoire tout court. L’auteur est passé par les maisons Balmain et Givenchy. Il connait donc ses matières. Mais en passionné d’histoire c’est le costume qui l’intéresse. Avec le cinéma. Un combo à la vérité parfois un brin alternative.
Alors Julien Magalheas rhabille Cléopâtre, la préférant à la grecque qu’en bling bling Las Vegas. Il recolle aussi les collants aux jambes des messieurs dans La Reine Margot, collants qui ne collaient pas à l’image de la masculinité version années 90. Il saigne par ailleurs Dracula. « Aucun des protagonistes du film n’est vraiment habillé correctement, la majorité des costumes a entre 10 et 20 ans de retard sur l’époque. En bon vieil excentrique qu’il est, la mise de Vlad Dracula n’est finalement pas beaucoup plus déplacée que celle du reste du casting. C’est le bonus caché du film de Coppola : finalement, le vrai massacre est historique et collectif ». Côté Titanic, Julien Magalheas retoque notamment le chapeau « vegan » de Rose car l’époque était aux bibis avec oiseaux de toutes formes et couleurs. Quant aux poulaines des Visiteurs « y’ a pas moyen » comme dirait Aya.
Afin d’étayer son propos, et surtout sa critique alerte, Julien Magalheas met chaque film en regard de tableaux, de documents témoignant de l’époque. Il offre des pitchs très perso des films et les inscrit dans l’histoire et le sociologie. Le Dracula de Coppola est ainsi rattaché à la passion victorienne pour les vampires. L’occasion aussi de (re)découvrir des chefs-d’œuvres de la peinture comme Le Cauchemar de Henry Füssli.
Erratum capillaires et militaires
Outre les vêtements, l’auteur mitraille les anachronismes capillaires et le bidouillage d’armes.
Il descend en majesté le » brushing babylis » de la jeune Marie-Antoinette qui fait plus Toinette à la ferme que Dauphine. Mais Marie-Antoinette n’aimait-elle pas jouer les Toinette ?
Dans Robin des bois il place une statue de Ute de Naumbourg toute en voiles sous sa couronne de pierre face à Robin (Kevin Costner) et Marianne (Mary Elizabeth Mastrantonio).
« Robin et Marianne ne se font face dans un dialogue chargé d’émotions et de laque fixante, rivalisant de volume capillaire, l’un avec un savant broché–méché arrière, l’autre, avec une permanente assez luxuriante pour abriter son microclimat. Or, ce qui est dérangeant dans cette scène, ce n’est pas tant la tenue parfaite des boucles, ni la probable coloration Reflets d’automne que l’on y soupçonne, mais le fait pour Marianne d’apparaître cheveux au vent devant un homme qui n’est ni de sa famille, ni à son service. » Et oui l’époque avait ses codes. Aux Germains pré XIIe siècle de la longueur en fonction de leur pédigrée. Aux Européens de retour des Croisades la vogue des voiles orientaux.
Julien Magalheas s’amuse aussi avec des légendes de photos qui relèvent presque du mème. Commentaires piquants de mise : « Une mise en beauté Natures et Découvertes » à propos encore du Robin des bois de Kevin Reynolds, sorti en 1991.
Toujours dans le capillaire, il se moque de la pilosité de Christophe Lambert-Vercingétorix alors que les Gaulois chassaient le poil et que leur mise s’inspirait, loin du tartan, des doux tissus romains. Voilà encore un mythe qui s’effondre. La faute à l’Asterix de Goscinny tout ça !
Coté armes et armures, les slips en cuir des 300 guerriers Spartes ne passent pas. Pas plus d’ailleurs que les « fresbees » de Xena ou encore les armures de Dracula. « Contrairement à ce que laisse penser son nom de MST relou, la chlamyde est en fait le meilleur atout des spartiates ». Moins Chippendales que le slip, la chlamyde est le super pouvoir des guerriers. Elle a par ailleurs inspiré la cape de superman indique l’auteur. Oui mais voilà la chlamyde est moins sexy que le slip en cuir.
Les longs-métrages ont recours à des historiens d’art, de la mode, de la guerre … Mais parfois la précision se révèle moins glam que les approximations voire les décalages et anachronismes. Julien Magalheas les pistent et les pointent avec une succulente dérision.
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Erratum Pour en découdre avec les anachronismes à l’écran
Julien Magalheas
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