Livre Chantal Thomas vagabonde en Arizona
Livre Chantal Thomas vagabonde en Arizona. Résultat, un journal-essai composé de multiples paysages : oniriques, littéraires, naturels, humains. Un mille feuilles savoureux à déguster sur un son vintage.
En janvier 1982, Chantal Thomas débarque à Tucson avec un sac bohème, des livres et des pensées polaires. Recalée en Alaska elle va en effet enseigner la littérature du XVIII e siècle et la conversion française en Arizona. Tout un paysage mental à revoir donc. Les cactus assoiffés remplacent la glace fondante.
Érudition folâtre
La jeune professeure arrive avec son bagage littéraire. Très très 60es avec Artaud, son théâtre et sa quête initiatique chez les Tarahumaras. Ou encore Kerouac et sa bande de vagabonds fêtards à la recherche de l’essence du voyage. De circonstance évidemment quand on vadrouille dans le désert.
Mais Chantal Thomas voyage aussi avec Sade et Mallarmé. Elle leur sera fidèle. L’écrivaine leur consacrera en effet plusieurs livres. Ici pas de pontification et un esprit rive gauche certes mais bien dilué dans la Margarita. Ce qui donne un voisinage, plus ou moins onirique mais irrésistible, entre Sade et Bécassine, la bonne bretonne qui arpente les expo. Une poupée qui crapahute vers le PLURIEN dans l’imaginaire de Chantal Thomas. Tandis que la poupée achetée au Colorado soutient la cause des femmes. Elle n’est pas la seule. Une collègue de l’université de Tucson pointe le foisonnement de « petit » attaché aux femmes dans le vocabulaire de la Marianne de Mallarmé.
Des paysages et des hommes
Chantal Thomas croque ce qui l’entoure. De manière truculente. Ses aventures en voiture de gangster, en bicyclette, ou cette scène où deux hommes s’entretuent presque dans une chambre voisine de la sienne. Au plus fort de cette rixe de saloon, ou plutôt de back room, elle continue à lire. Un peu gros peut-être. Peut-être pas, car cet épisode est l’occasion de réfléchir au but de la lecture. À la fois se protéger du monde et s’ouvrir à lui. Les hommes, la jeune prof les goûte volontiers. Ceux qui l’intéressent bien sûr, pas les lourds. Elle en dessine une série de portraits chamarrés ainsi qu’un paysage de la vie étudiante dans les bars, les bibliothèques et près des piscines. Image de cet étudiant qui lit, immergé, les deux mains feuilletant un livre en bouillie. On revisite les taches bleues de David Hockney.
Mais ici l’eau est aussi une ressource. Des pages sur les cactus malades de la sécheresse succèdent au prologue sur le désastre environnemental qui s’annonce en Alaska et ailleurs.
Le journal d’Arizona parle ainsi sur la brèche. Celle de la fin de l’insouciance avec le sida qui rode et le désastre climatique qui s’annonce (1972 rapport du Club de Rome qui va donner naissance au GIEC). On se régale toutefois de ce printemps tuscono-mexicain, un rien Gozo, un plein d’érudition malicieuse et d’observation pointue.
INFOS
Journal d’Arizona et du Mexique (janvier-juin 1982) Chantal Thomas – membre de l’Académie française
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