Catherine Cusset dans la tête de David Hockney

Catherine Cusset dans la tête de David Hockney. Le roman érudit d’une fan totale qui mêle l’intime, le processus créatif et presque un siècle d’histoire, d’art et de moments sociétaux. Ce qui reste est l’optimisme car They can’t cancel the spring.

Catherine Cusset a plusieurs vies. Le sienne bien entendu. Celle d’une agrégée de lettres classiques, ancienne élève de l’ENS (École normale supérieure) devenue une autrice prolifique, saluée par la critique et des prix convoités comme celui des lectrices de Elle en 2 000 pour « Le problème avec Jane » et le Goncourt des lycéens en 2008 pour « Un brillant avenir ». Ensuite sa vie avec Proust, auteur brillantissime qu’elle a lu trois fois depuis l’âge de 15 ans. Enfin sa vie avec David Hockney qui vient de ressortir chez Gallimard. Pas de doute, Catherine Cusset aime vivre avec des légendes. Peut être va-elle en faire une une série, une collection. Ma vie avec David Hockney se prêterait par ailleurs assez bien à la formule biopic.

Car tout y est palpitant. Tragique parfois, attachant toujours, en mouvement sans cesse. Il y a du sexe, des fêtes (du Swinging London à la Gay California), des morts, des piscines, des virées en voiture dans des canyons hallucinés de Californie, des innovations, des méditations, des chiens, des communautés, des familles, des drogues, des costumes épicés, des printemps anglais en érection, des hivers chauds en noir et blanc. Les couleurs éclatent, éclaboussent les pages.

David Hockney, 87 ans, est une icône de l’art. Sans doute le peintre vivant le plus cher du moment. En 2018, Portrait of an artist avait été adjugé pour la somme record de 90,3 M$ chez Christie’s New-York. Il a bravé l’époque en explorant le figuratif en pleine vague abstraite. Et a persévéré. Hockney est un têtu. Il est aussi une icône happy gay. Un optimiste indéfectible, force qu’il puise dans le travail, dans la création selon l’autrice.

Catherine Cusset aborde la vie de l’artiste en se mettant dans sa tête, voire dans sa peau. En fan totale elle brasse ainsi presque un siècle, traverse les continents et prévient que tous les faits sont exacts mais que toutes les sensations, sentiment et pensées relèvent de la fiction. Une nouvelle fois on pense à un futur biopioc avec les précautions d’usage. Car il reste à savoir si la groupie Catherine Cusset serait une interlocutrice docile.

Le roman, lui, est une fiction aussi intime, viscérale que documentée. La vie avec David Hockney traverse les grandes épidémies (sida, covid19), les moments politiques et sociétaux (homosexualité, immigration, « puritanisme » sanitaire …) ainsi que les grands moments de création (photomontage, exploitation de la perspective inversée, recherches sur les méthodes des maitres anciens -lentille …-, appropriation des nouvelles technologies -du fax à l’I PAD- ….) C’est pointu mais se lit comme un page turner ou presque. Les focus sur les quelque 50 œuvres conjuguent érudition et pétillement des sens.

Il est vrai que David Hockney est un pétillement, un hymne à la vie. Ce que résume « Remenber that they can’t cancel le spring » en néon sur la façade de la fondation Louis-Vuitton qui consacre une vaste rétrospective à l’anglais sur qui le soleil ne se couche jamais. Ou presque. Un natif de Bradford (Yorkshire) qui partage sa vie entre Londres, New-York, la Californie et la Normandie.

Une joie de vivre que Catherine Cusset résume ainsi p 206 « Son émerveillement ne faiblissez pas. C’était son pied de nez à la maladie à la mort. Jamais la mort abolirait le printemps ».

INFOS

Photo Catherine Cusset par F.Mantovani / Éditions Gallimard

Vie de David Hockney

Catherine Cusset

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