Expo Cent ans d’Art déco au MAD

Expo Cent ans d’Art déco au MAD. L’histoire, en plus de 1 000 œuvres, d’un style iconique né dans l’effervescence des années 20. Un voyage un peu didactique qui culmine avec l’Orient Express et ses artisanats d’exception.
Paris célèbre les cent ans de l’exposition qui, en 1925, a baptisé le style dont elle était déjà la capitale. Le MAD a choisi de ne pas faire une simple rétrospective : il a recréé des mondes. Des centaines de pièces, meubles, bijoux, robes, affiches, dessins, forment alors une constellation où l’on circule comme dans un immense appartement des années vingt. À la fois fastueux et étrangement intime.
L’Orient Express le luxe en mouvement

Au cœur de l’exposition, la grande nef du musée se transforme en un sanctuaire voyageur, où trône la pièce maîtresse : une reconstitution du mythique Orient Express. Symbole ultime du glamour des Années folles, ce train légendaire incarne l’alliance parfaite entre luxe et innovation technique.
Cent ans d’Art déco revient sur les origines de l’Orient Express, à travers la personnalité de son « inventeur », Georges Nagelmacker, en 1883.
Une cabine authentique de 1926, issue des collections du musée, y est exposée. On reconnait la patte des grands de l’Art déco. Notamment René Prou et Lalique avec des verres ciselés et des motifs floraux stylisés évoquant la vitesse et la liberté du siècle naissant.

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Mais l’exposition préfigure aussi le retour imminent du train de légende en 2027. En regard du wagon historique « Étoile du Nord », trois maquettes du futur Orient-Express. Le designer Maxime d’Angeac les a imaginées à l’échelle réelle. On passe du passé au futur en trois pas. Le choc est saisissant. Les lignes restent pures, les matériaux nobles, mais la technologie du XXIᵉ siècle a remplacé les dorures par des silences ouatés et des lumières qui semblent respirer.
Focus sur le travail des artisans
Partout, la main de l’artisan triomphe. On reste longtemps devant les laques de Jean Dunand, si profondes qu’on a l’impression de pouvoir y plonger le regard comme dans une eau noire. Les ébènes de Macassar, les galuchats, les ivoires patinés par le temps composent une palette sombre et luxueuse qui fait oublier qu’on est en 2025. Clément Mère, notamment, y est magnifiquement représenté : une table à journaux où la peau de raie semble encore frémir, un pare-feu dont la soie brodée capte la lumière comme une toile d’araignée précieuse.

Les verriers François Décorchemont fondent des cristaux aux reflets irisés. Les maroquiniers créent des nécessaires de voyage incrustés de galuchat – cette peau de raie granuleuse si prisée. Ces techniques soulignent indéniablement la dualité de l’Art déco. Un art décoratif qui élève l’utile au rang de chef-d’œuvre. Un art où la géométrie pure rencontre la somptuosité des matériaux rares comme la soie brodée ou le palissandre.
Ambiances immersives : intérieurs privés et parcours sensoriel

L’exposition n’est pas un simple défilé d’objets. Elle reconstitue certains univers intimes des Années folles. La scénographie, confiée à l’Atelier Jodar et au Studio MDA, imagine ainsi des ambiances immersives qui transportent le visiteur entre salon feutré et boudoir secret. À l’étage, les intérieurs vous enveloppent. Le bureau-bibliothèque de Pierre Chareau, conçu pour l’ambassade de France en 1925, diffuse une lumière ambrée qui donne envie de s’asseoir et de ne plus bouger. Juste à côté, le chiffonnier en galuchat d’André Groult : on imagine sans peine les flacons de parfum et les lettres cachetées qu’il a gardés secrets pendant un siècle.
Entre abstraction et fantaisie
Par ailleurs, le parcours thématique – des origines abstraites aux évolutions contemporaines – guide le public à travers des espaces précis. Abstraction géométrique avec Sonia Delaunay, pureté formelle chez Eugène Printz, ou encore fantaisie décorative chez Albert-Armand Rateau.
Pièces iconiques et femmes pionnières

Au-delà des décors grandioses, l’exposition met en lumière les créateurs qui ont forgé l’Art déco, avec un regard complice sur les femmes.
Jacques-Émile Ruhlmann, maître du raffinement, y est honoré pour ses meubles aux lignes fluides et aux incrustations précieuses. Ainsi que Jean-Michel Frank, pour son minimalisme luxueux.
En joaillerie, les broches de Raymond Templier et Jean Desprès scintillent d’un modernisme audacieux, en dialogue avec plus de 80 pièces de Cartier : colliers, diadèmes, boîtes et montres, exposées pour la première fois en écho aux collections du musée.
de Vionnet à Delaunay

Les femmes, de Vionnet à Delaunay, incarnent l’essence rebelle de l’Art déco : un style qui, dans un monde post-guerre, célèbre la féminité émancipée à travers la mode et le design.
Eileen Gray et son fauteuil Bibendum, bien sûr. Mais surtout les textiles vibrants de Sonia Delaunay, la robe Petits chevaux de Madeleine Vionnet – ce crêpe de soie si léger qu’il semble défier la pesanteur –. Sans oublier les broderies foisonnantes de Marguerite Pangon, ni les plissés impeccables de Jeanne Lanvin. On sort de ces salles avec le sentiment que l’Art déco n’a pas seulement émancipé les formes : il a libéré celles qui les portaient.

Un héritage vivant : de 1925 à nos jours
L’exposition est dense, parfois presque scolaire dans son ambition encyclopédique. Mais elle ne cède jamais à la froideur muséale. On y sent en effet la chaleur des matières, la vibration des motifs, le souvenir des nuits de 1925. En quittant la nef, on emporte avec soi cette évidence : l’Art déco n’est pas mort. Il a simplement changé de wagon.
INFOS
Exposition 1925-2025. Cent ans d’Art déco
du 22 octobre 2025 au 26 avril 2026
Tarifs et réservations sur le site du Musée des Arts Décoratifs madparis.fr
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