Sophie Hong la soie subterfuge La Piscine – Roubaix
Sophie Hong la soie subterfuge La Piscine – Roubaix présente une exposition sur la créatrice taïwanaise qui nous bluffe par le rendu trompe l’oeil de ses pièces uniques. Le secret : tissage ancestral, teintures naturelles et special touch. Aperçu de l’univers d’une amoureuse des arts dont les créations ont rejoint le musée Galliera.
Un regard furtif discerne du cuir, de la laine, du denim, du velours, des couvertures de livres anciens, des fibres de champignons … Mais non, les vêtements sont en soie. De la soie traitée en suivant des méthodes ancestrales chinoises qui remontent aux Ming (1368-1644) pour le tissage et à la dynastie Song (960-1279) pour les teintures. Ce rendu magnifique et déroutant, ce subterfuge, c’est la marque de fabrique de la styliste taïwanaise Sophie Hong.
Avec l’exposition « Des feuilles de mûrier le temps fait des robes de soie » consacrée à l’artiste, La Piscine – Musée d’art et d’industrie André Diligent de Roubaix confirme son nouvel ancrage dans le passé textile. Précédemment, l’établissement avait en effet célébré Élisabeth de Seneville, Michel Schreiber, Marimekko, Agatha Ruiz de la Prada.
« Sophie travaille dans le respect de la matière et des gens qui les portent » estime la commissaire de l’exposition Sylvette Botella-Gaudichon. Ce respect se double d’une longue patience, d’une humilité face au(x) temps.
Des bains et de la danse
La soie tissée forme une matière première à sculpter comme un bronze, une céramique, un bijoux.
Cette sculpture surgit après l’observation d’un rituel méticuleux qui passe par une succession de phases de teintures. « Les rouleaux de soie baignent dans une trentaine de bains de décoction de pigments d’écorces et de plantes avant d’être étendus sur des champs de terre glaise riche en fer où la matière va s’oxyder au soleil le temps voulu » poursuit Sylvette Botella-Gaudichon. Les pièces imprégnées de gambier -igname très riche en tanins colorés- font l’objet d’un traitement qui s’apparente à une danse de teinturiers experts (1).
Sophie Hong la soie subterfuge La Piscine – Roubaix
Ce mélange animal, végétal, minéral, ce fruit de la terre, du soleil, de la lune donne une soie laquée à double face et aux subtiles nuances. Des tons bruns et noirs profonds d’un côté, des bleus ou des rouges de l’autre.
Sophie Hong retouche ensuite la matière pour en faire des pièces uniques : étoles, vestes, pantalons, robes.
Pièces réversibles, teintes subtiles et « retouche »
Cette « retouche », comme la nomme la couturière, est un art de la torsion, de la pliure, voire de la moulure. Boutons précieux, broderies éclatantes, ganses qui achèvent une bordure des cols, des manches complètent la « retouche ».
« Les vêtements, nés de l’inspiration et des émotions de Sophie, prendront une autre vie et d’autres teintes sur ceux qui auront la chance de les porter » commente la curatrice.Il n’y a pas de mode d’emploi. On se les accapare en alternant les faces, seuls ou superposés, avec ou sans soques, les fameuses sandales de Ronin.
Scénographie : une île préservée
« La scénographie reflète la volonté de Sophie Hong de travailler l’idée d’île et de préservation » selon Sylvette Botella-Gaudichon.
L’exposition présente en effet les pièces sur une sorte d’îlot de bois hérissé de bambous croisés et parsemé de cailloux blancs qui évoquent une rivière. Les pièces flottent ou s’arriment à ces socles végétaux. Des rouleaux de soie reposent comme des joyaux sur des barres de bois. Une large robe tellurique lévite au-dessus d’un autel de bambous.
Un mur de marionnettes
Pendant la visite de presse Sophie Hong reste très discrète. Elle regarde, approuve, sourit. Sa réserve s’estompe devant le mur de marionnettes. Elle en saisit une puis deux, commence un mini show et se prête avec plaisir aux selfies,
Les marionnettes occupent une place centrale dans la culture Taiwanaise La créatrice habille d’ailleurs celles du Centre d’Art de Marionnettes de Taipei. Mais on peut aussi acheter une miniature lookée par la styliste. Joli souvenir ou idée Déco.
Entre Paris et Taïwan
Sophie Hong rayonne entre son île, où elle a fondé la librairie française Le Pigeonnier avec Francoise Zylberberg, et sa boutique parisienne de la galerie du palais Royal. Elle y accueille artistes et fidèles et invente des défilés sur les trottoirs de la capitale.
L’exposition montre des clichés de ses showcases où les mannequins sont perché(e)s sur les soques, téléphone portable à l’oreille.
On découvre également le travail d’orfèvrerie de Sophie Hong : des pièces qui évoquent des entrelacement de fils de soie.
Étonnant ?
Avec sa soie subterfuge Sophie Hong joue avec un fondamental de la mode : le regard. Plus généralement ses créations questionnent notre perception de la réalité et des apparences.
Vous porterez bien un mirage !
(1) Sophie Hong « Des feuilles de mûrier le temps fait des robes de soie » Editions Galerie-galeriéditions/ catalogue de l’exposition / p82-85
http://www.ateliergalerieditions.com/
Sophie Hong la soie subterfuge La Piscine – Roubaix
Sophie Hong « Des feuilles de mûrier le temps fait des robes de soie » La Piscine – Roubaix
https://www.roubaix-lapiscine.com/
Crédits photos : FineLife TV, Lucien Lung, Ko Si-Chi
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Defile Sophie Hong © Lucien Lung