Les chiens de faïence Thomas Louis : petits suicides en famille

Les chiens de faïence Thomas Louis : petits suicides en famille. Autour des Dugast, dont les membres se suicident les uns après les autres, l’auteur construit une satire sur la famille et la ruralité. Ce premier roman interroge aussi la vie et son sens. Cynique et irrévérencieux à souhait !


Tout commence avec le grand-père paternel qui se pend. Comme ça sans raison apparente.
Suit la grand-mère qui incruste sa voiture dans un tilleuil au lieu de se contenter d’une infusion.
Plus sportif, le grand père maternel saute dans une falaise
Enfin (presque) après le reveillon de Noël, la grand-mère maternelle s’achève au désherbant.


Chez les Dugast on évoque une malédiction.
Dans le village on épie puis on évite. Qui sait, les suicides à répétition c’est peut-être contagieux.

Christophe, l’aîné des Dugast, fuit la « malédiction » comme l’atmosphère oppressante de la famille et du bourg. Direction Paris, dans un autre village : Montmartre. Il veut vivre à tout prix. Et surtout ne pas survivre en catimini, dans l’ennui et la peur, en attendant le doigt de la faucheuse.

Loin de l’image bobo d’une ruralilé heureuse, le livre de Thomas Louis dresse un portrait acide de la vie d’un village.
Dans l’arrière pays lyonnais on ne connaît certes pas l’anonymat des villes. Le bourg carbure à la surveillance douce. Avantage : les yeux et les langues évitent le recours aux caméras espionnes.
Les Dugast célèbrent donc les fêtes pour faire comme les voisins. Le loi du qu’en dira-t-on caracole loin devant la solidarité.
“Les gens étaient des bêtes dont le train train baignait dans une sauce glacée”.


Avec la même malice, l’auteur démonte le famille que les pros du marketing vendent comme l’ultime refuge pour mieux placer électroménager, vacances, jouets … Bref pour consommer et se tenir tranquille. Mais chez les Dugast, comme ailleurs dans le village, on ne communique pas dans la béatitude. On cohabite, on se regarde en chiens de faïence. D’où le titre de l’ouvrage.

Quant à la transmission associée à la famille, elle prend la forme d’une malédiction, d’un héritage mortel. Le mauvais sort est ordonné. Il suit un ordre comptable strict : celui des années. Le plus vieux le lègue à l’immédiatement plus jeune.

Sur sa lancée de déssoudeur, Thomas Louis dézingue la cité des lumières. Les aventures parisiennes de Christophe s’avèrent en effet glauques et limitées. Très loin des expériences formatrices des héros du 19e siècle. Christophe débarque chez une amie de sa mère, une octogénaire alcoolique, camée et libidineuse. Fêtarde aussi. Au coeur des vignes de Montmartre on se lâche plus que chez les vignerons Dugast père et fils.

Cynique, irrévérencieux, le premier roman de Thomas Louis, jeune auteur de 28 ans, dénote dans la la rentrée littéraire.
On s’amuse de ce décryptage des stéréotypes, comme on admire le défi que l’auteur relève brillamment. Faire rire avec le suicide n’a rien d’évident. Quant à la fin, son immoralité est bruffante. Thomas Louis est un petit impertinent qui ne respecte rien. Pour notre plus grand plaisir !

Les chiens de faïence
Thomas Louis
Éditions de la Martinière
https://www.editionsdelamartiniere.fr/livres/les-chiens-de-faience/

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