Les garçons qui brûlent : un polar soporifique

Les garçons qui brûlent : un polar soporifique de la nouvelle étoile islandaise Eva Björg Ægisdóttir. Un garçon de 20 ans meurt dans un incendie une semaine après la disparition d’une jeune fille au pair. Crime, suicide ? La célèbre inspectrice Elma enquête et fouille le quotidien d’une petite ville et de ses familles proprettes. Malgré des personnages assez complexes et quelques surprises l’intrigue s’enlise dans le dénouement.

Eva Björg Ægisdóttir est vue comme l’unes des nouvelles gloires du polar nordique. On parle de la trentenaire islandaise comme d’une digne héritière de Camilla Läckberg ou encore d’Arnaldur Indridason. Certes Elma, best seller en Islande, a conquis 100 000 lecteurs-trices en France. Toutefois – du moins après lecture de son dernier opus “Les Garçons qui brûlent”- on écarte le prestigieux héritage indridasonien. Et s’il faut parler d’étoile, elle est est bien pâle à côté de celle des géants Arnaldur Indridason ou Ragnar Jónasson. Et cela même si Eva Bjōrg Ægisdóttir a remporté le Blackbird Award, créé par ce dernier pour récompenser les talents les plus prometteurs d’Islande.

Une intrigue dans les placards d’une famille modèle

Eva Björg Ægisdóttir place son intrigue à Akranes, petite ville modèle proche de la capitale Reykjavik. L’inspectrice Elma enquête sur la mort d’un jeune homme de 20 ans dans un incendie hautement suspect. A priori Marinó, la victime, a absorbé des somnifères avant de mettre de feu à la maison familiale. Étrange. Alors crime ou suicide ? Aucune trace d’effraction, aucune lettre, aucun motif. Mais une caméra de surveillance révèle bientôt une présence furtive devant la maison le soir fatal. Puis Elma découvre des recherches étonnantes sur l’ordinateur du jeune homme. Thème : comment enterrer un corps ?

L’inspectrice Elma commence évidemment par interroger Frida, la jumelle de la victime, et ses amis. Une bande de 4 jeunes aux auras sombres pour certains. D’abord Sonja qui attire l’obscurité. Puis Arik son compagnon avec qui Marinó a eu une dispute. En contrechamp il y a le solaire Andri, champion de foot en route vers une carrière internationale et couvé par une famille aimante et unie. Mais tous au final évoluent dans un clair obscur toxique.

Eva Björg Ægisdóttir conduit son inspectrice à resserer les recherches autour de la famille d’Andri. Et c’est tout un monde de normes qui va sauter.

Normes et hypocrisie sociales

Notons qu’Eva Björg Ægisdóttir s’inspire de sa propre biographie. L’écrivaine est née à Akranes qu’elle peut donc décrire sans trop de peine. Elle est aussi mariée et mère de 3 enfants comme Laufey, l’une des principales protagonistes du livre. Les petits soucis du quotidiens lui sont, on le devine, familiers. En revanche on ne lui souhaite pas les déviances du mari de Laufey.

Elma dans son enquête va alléger les vernis de la communauté. Un décapage en règle des mensonges, des faux semblants et des silences. Un mari, Unnar, infidèle en série, malheureux dans son rôle d’époux et de père. Une mère qui joue la cécité pour ne rien bousculer. Des amis du couple qui, ou bien flattent leurs liens conjugaux, ou bien colportent des rumeurs. Sur les disparitions des jeunes filles au pair du couple par exemple. Elles sont deux. Lena et Lise. La dernière s’est volatilisée une semaine avant la mort de Marinó.

Un polar lent et un dénouement convenu

Eva Björg Ægisdóttir met une centaine de pages à installer les personnages. C’est long, on s’ennuie. La relative complexité des protagonistes est un atout qui n’efface pas l’impression de lenteur.

L’écrivaine maîtrise l’art d’amener les personnages mais pas celui de dynamiter les certitudes. On a vite fait le tour des potentiels suspects même si le récit réserve des surprises. Et ces surprises demeurent conventionnelles. Pas question bien entendu de spoiler le récit. Mais qui niera que le thème des mères prêtent à tout pour leurs enfants est presque rongé jusqu’à la corde.

Le silence de la communauté est plus intéressant et Eva Björg Ægisdóttir décrit assez bien la pesante banalité quotidienne. Elle pointe aussi la délicate question du consentement.

Quant à la structure linéaire entrecoupée d’extraits du journal d’une jeune fille au pair elle rend la lecture facile mais ne dynamise pas le récit.

Bref le dernier polar d’Eva Björg Ægisdóttir respecte les standards nordiques mais ne réussit pas à nous immerger dans les tensions, à remuer nos fantômes, à nous glacer comme certains récits d’Arnaldur Indridason.

“Les garçons qui brûlent” est idéal pour la pré sieste d’été et son soleil que l’on espère pas trop brûlant.

INFOS

Les garçons qui brûlent

Eva Björg Ægisdóttir

Éditions de La Marinière https://www.editionsdelamartiniere.fr/

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