Expo Carolyn Drake met les mâles à poil
Expo Carolyn Drake met les mâles à poil à la Fondation Henri Cartier-Bresson. Men Untitled livre à travers une trentaine de clichés une version vulnérable et parfois absurde de la masculinité derrière ses stéréotypes. Troublant !
À l’entrée de l’exposition des mains émergent d’un tissu bleu pétrole, bien claquant. La photo résume d’emblée le sentiment général. Une vulnérabilité derrière un élément de décor, de construction d’une identité sociale en même temps qu’une protection comme pour les tableaux. Une masculinité cachée comme le corps des femmes par la burqua.
Selon sa biographie, Carolyn Drake « travaille sur des projets photographique au long cours qui cherchent à interroger les récits historiques dominants et à les réimaginer de manière créative ». La photographe californienne est lauréate 2023 du prix décerné par la Fondation Henri Cartier-Bresson tous les deux ans. D’un montant de 35 000 euros il aide à la création d’une œuvre ou d’un projet. Il s’accompagne également d’une exposition.
Selon la créatrice Men Untitled résulte d’une réflexion de plus d’un an qui, finalement, aboutit à un corps masculin dont « l’autorité s’était volatilisée au moment où j’avais pris la liberté de regarder ».
indéniablement l’autorité est absente dans les crâne nus où perlent les circonvolutions du cerveau. Carolyn Drake choisit des modèles âgés au physique très éloigné d’une image de magazine. Elle leur demande aussi de poser nu. Les nus masculins sont peu répandus à l’inverse des corps offerts des femmes. L’Antique est loin.
Ce qui émerge est avant tout la fragilité. Carolyn Drake travaille sur la peau flétrie : corps et crânes de vieillards. La vulnérabilité perce également à travers la « réimagination » des attributs de la masculinité, de la chair aux métiers en passant par les activités. On saute alors d’un homme en puissance, en majesté à l’atelier, au garage, près de motos et d’outils divers à un homme en fragilité. L’outil d’acier contre un torse gras ou encore un corps d’homme pendu par les pieds comme en réparation à la place de la moto de son atelier.
Mise en scène entre installation et diptyques
Carolyn Drake fait son monde entre installation et diptyques. Samson victime des crèmes de beauté, centaure au bouquet, sexe aux miroirs …
Au centre de l’exposition une installation composée de trois parois couvertes de pages de journaux féminins et de photos d’actrices hollywoodiennes des années cinquante. Tout ici incite à se surpasser à travers gym et cosmétiques pour attendre beauté et santé. Pour briller comme une star. Au milieu de cette Glory, un homme. Une vision de la masculinité entre le Joker en ultra dépression, Edwart aux mains d’argent, la créature inachevée de Tim Burton, et une marionnette cassée. L’homme est habillé d’un noir qui fait ressortir sa peau très blanche sans doute pour répondre aux couleurs du fonds. Et peut-être et surtout à la vision brute de la masculinité. Il porte des ciseaux et ses cheveux coupés l’entourent sur le sol comme une auréole déchue. L’image est forte. Alice Drake réussit indéniablement son coup. Car l’installation est un instantané d’ébranlement. Samson victime des standards de beauté.
Alice Drake s’attache également aux diptyques.
On distingue une sorte de centaure au bouquet. Le sexe est remplacé par des fleurs, il se trouve en fait à côté sous forme de moulage dans une autre photo. Et aussi ce diptyque aux miroirs et photos. D’un côte un homme nu qui cache son torse et son sexe avec des miroirs et de l’autre un homme habillé qui cache sa tête avec des photos de femmes.
Mâles à poil et en dérision : un zeste d’Erwin Wurm
Enfin, dans certaines compositions photographiques on trouve un zeste d’Erwin Wurm. L’artiste autrichien s’est fait connaître par ses performances in situ mettant en scène des personnages dans des situations ridicules.
Indéniablement la photo de l’homme qui marche sur un tronc d’arbre à quatre pattes avec des chaussures aux mains comme aux pieds (photo principale) fait référence à l’absurde cher au créateur. Comme le fait aussi le cliché du sexe masculin qui sort d’un grand carton. Et évidemment le très beau noir et blanc d’un homme nu aux sneakers sur la tête et un pied. Une référence en clair obscur à la fois à Wurm et au Caravage.
Car l’exposition de Carolyn Drake qui met les mâles à poil les met aussi en tableaux. Comme en témoigne l’homme courtisane qui pose nu sur un sofa et fait face à un autre homme dans la boue. Grandeur, décadence et réimagination de la masculinité commune.
INFOS
Men Untilted
Carolyn Drake
Fondation Henri Cartier-Bresson
Related article Expo Carolyn Drake met les mâles à poil
Erwin Wurm philo photographies MEP
Expo La Fondation Henri Cartier-Bresson interroge l’identité et la trace