Loading expo immersive sur le street art numérique
Loading expo immersive sur le street art numérique et en XXL, du writing des années 60 aux apparitions dans le metaverse.
On entre et on s’assoit dans la Cathédrale, le plus grand espace de l’ancien Opéra Bastille avec ses 24 mètres de haut. Ou bien on monte au premier étage et on regarde debout. Pendant 25 mn. Un écran de 400 m2. Le temps passe vite, on est embarqué. Par les sons, par les visuels qui débordent et viennent parfois lécher les pieds. Par l’histoire que raconte le documentaire de Mehdi Mejri, une épopée du street art à travers des images d’archives et d’autres surprenantes, iconiques. Une traversée du temps, de l’espace et des techniques.
Art urbain : des murs au 2.0
Dans les années 60 à New-York, les enfants écrivent leurs noms, prénoms et pseudonymes, parfois associés à un numéro de rue, sur les murs. Le writing se répand. Une décennie plus tard la presse parle de graffiti. L’espace urbain des mégapoles devient une immense grotte de Lascaux. Les rues, les murs, les trains sont bombés.
Pour capter les couleurs, Henry Chalfant a une méthode bien à lui. “Je me lève très tôt pour me rendre à la gare ferroviaire du Bronx » nous avait-il confié. Ici ses images de métros qui se croisent voyagent dans la grande fresque du street art 2.O.
Une toile où s’inscrivent des œuvres posées en cubes parmi les vagues ou dessinées sur une façade d’immeuble par un(e) artiste perchée(e) sur une nacelle. On passe de Sāo Paulo à New-Delhi. De la nacelle au drone. Si on rembobine on apprend qu’en 1980 Jane Dickson imagine des séquences de trente secondes, les Messages to the public. Keith Haring et John « Crash » Matos y participent. Un avant goût de ce que sera la peinture de fresque avec drones télécommandés.
Dans le film, le rendu est spectaculaire. Notamment une séquence où un drone justement survole les toits du Caire avant de livrer l’œuvre. Ou encore celle où une boule monde fonce entre deux murs graffés et implose en fragments psychédéliques. On dirait du Pink Ployd commente un visiteur. Perdu ! Pour la musique du moins. Car la bande son du film projeté à 360 ° sur trois murs du rez-de-chaussée est signée Roque Rivas. Une réussite.
Photos et écrans : nouvelle mémoire de l’art urbain
Martha Cooper et Henry Chalfant ont été les premiers à documenter le graffiti avec leurs objectifs. Aujourd’hui, d’autres prennent la relève pour garder une trace de ce qui est destiné à disparaitre. Christian Omodeo, commissaire de l’exposition, évoque ainsi Alex Fakso qui, dans les années 90, définit une nouvelle esthétique. Comment ? « En figeant les émotions et les postures emblématique de cette culture : agenouillé sous un train dans l’obscurité, ou debout en face d’un wagon, le visage caché par une cagoule, avec une bombe aérosol dans la main et l’odeur de la peinture fraîche dans l’air … ». Depuis 2015, Cristobal Diaz filme l’intégralité du processus de réalisation à l’aide notamment d’un papier calque et de plexiglas dans le but d’archiver le graffiti français.
Dans la semi pénombre des espaces en béton brut, on découvre d’autres gestes contre l’oubli. L’artiste sud-coréenne Jazoo Yang utilise ainsi son pouce pour imprimer la mémoire. Les points créés par son empreinte digitale veulent dessiner le souvenir des bâtiments voués au néant à cause de la modernité vorace. Une cabane de pêcheur par exemple.
Une technique ancestrale loin des nouvelles technologies. Mais qui les utilise. De fait les artistes du béton sont bien présents dans l’immatériel. Le net. « C’est par le biais des jeux vidéo, comme Street Fighter (1987), que le graffiti s’est infiltré dans l’univers du numérique » rappelle Christian Omodeo. Aujourd’hui les techniques digitales assurent à la fois la pérennité des œuvres et un rendu spectaculaire. À travers les immenses fresques en particulier. Le public ? « Aujourd’hui, tout artiste peut déterminer à qui s’adresser en priorité. Une œuvre peut être peinte pour le passant qu’il la découvrira dans la rue, pour des spectateurs qui la verront sur leur téléphone ou pour ces deux publics en même temps, sans que son choix soit forcément lisible » lit-on dans le dossier de presse.
Loading … avec bug
Avec « Venise », sa première exposition, le Grand Palais Immersif avait déployé une science de l’espace, du mouvement et de l’histoire. Résultat : une immersion dans le beau, un voyage sensoriel sous les canaux, sur les gondoles, derrière les murs des palais. Loading est nettement en dessous dans la partie metaverse. « »Bombing the métaverse » plus précisément. C’est un peu le bug de l’exposition Loading. On se console en graffant son « blaze » ou en partant à la chasse aux œuvres urbaines et surtout en savourant le film.
INFOS
LOADING. L’ART URBAIN À L’ÈRE NUMÉRIQUE
du 6 décembre 2023 au 21 juillet 2024
Grand Palais Immersif, 110 rue de Lyon – Paris 12e
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