Biennale Venise Laure Molina irise les canaux
Biennale Venise Laure Molina irise les canaux. L’artiste a alerté contre la pollution à travers trois performances inspirées par l’activisme environnemental de Nicolas Garcia Uriburu
Quel rapport entre le thème de la 60e édition de la Biennale de Venise, « Étrangers partout », et l’activisme environnemental ? Réponse de Laure Molina : la lutte. Résultat : une déclinaison autour de comment être étrangère en six flux. Six nuances de la crise écologique. Concrètement une performance en trois actes qui s’est déroulée lors du vernissage de la Biennale 2024. Il s’agissait de libérer dans les canaux vénitiens des pigments naturels et composés chimiques évidemment sans aucun danger pour la biodiversité et l’environnement. Pour cela Laure Molina s’est directement inspirée de l’acte pionnier de Nicolas Garcia Uriburu, qui avait coloré le Grand Canal en vert fluo en 1968.
De fait la plasticienne porte une œuvre qu’elle dit axée « sur des revendications personnelles profondes telles que la lutte contre les guerres dans notre monde actuel ou bien la lutte pour davantage de rapidité quant aux prises de décision gouvernementales sur l’écologie et le développement durable ».
Venise terre d’art et de surtourisme
Performer dans le cadre de la Biennale est idéal. Le relais médiatique est en effet assuré. Mais l’artiste a également choisi Venise car la cité des Doges est en proie à de fréquentes montées des eaux, conséquence directe du réchauffement climatique. La ville est aussi exposée à un tourisme de paquebots qui impacte le patrimoine comme les eaux. La mairie vient d’ailleurs d’instaurer une taxe de 5 euros pour les visiteurs ne résidant pas une nuit dans la cité. Une mesure jugée insuffisante et qui brouille les pistes dans le contexte notamment d’extension de l’aéroport. Quid dans ces conditions tourisme de masse à Venise ?
L’art de l’irisation
Mais quid aussi de l’irisation. « L’irisation est un phénomène physique, optique et scientifique inspirant l’industrie, l’artisanat et l’art. On évoque l’irisation quand une surface change de couleur, quand il y a effet miroité ». L’irisation produit le plus souvent un arc-en-ciel apparaissant sur la surface de certains corps. D’ailleurs son étymologie latine dérive de « iris », qui signifie arc-en-ciel.
Irisation et guerre de couleurs
Le lien avec le thème l’édition 2024 de la Biennale de Venise se fait aussi à travers un rêve et une colorimétrie charnelle.
« L’irisation représente en premier lieu un rêve, que je faisais étant enfant. Je quittais le monde matériel et physique et j’évoluais dans des pièces colorées. Ce rêve, je l’ai retrouvé dans les légendes des cultures natives que j’ai pu approcher, comme les blackfeet en Amérique du Nord, j’ai même retrouvé, l’irisation chez les aborigènes (…).
Maure Molina travaille une quinzaine d’année la technique de l’irisation.
Ensuite elle la met en relation avec la culture afin de créer des espaces chromatiques charnels à l’image des « couleurs de la peau qui créent les différentes communautés et cultures qui peuplent la terre. L’irisation pourrait être l’étendard visuel de ce qu’est la Déterritorialisation dont parle Gilles Deleuze. Il l’évoque en donnant l’exemple de la diaspora, des mouvements de la population à travers le monde, des personnes qui emportent avec eux leur culture, leurs langues, leurs traditions dans de nouveaux contextes, comme le mouvement de la longueur d’onde qui, dans le monde physique, donne une couleur, un composant »
Police et arcs-en-ciel
Laure Molina irise les canaux en mélangeant les pigments. Elle a profite des marées pour les disséminer. Tout d’abord au pont du jardin de la biennale ensuite au Pont du Grand Canal. Mais performer comporte des risques. L’artiste et son principal partenaire ont été interpellés par la police aux alentours du pont dell’Accademia après avoir libéré les différents flux de couleurs dans le Grand Canal de Venise.
INFOS
Acte 2 – 19 avril 15h – Pont du Grand Canal* –
https://youtu.be/mgXYYcQ3VLM
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