Livre La visite éclair d’Hitler dans Paris

Livre La visite éclair d’Hitler dans Paris. Michel Guénaire reconstitue le parcours du chef de l’Allemagne nazie dans une capitale morte. Un itinéraire conquérant, un parcours historique et artistique. Aux côtés de Speer son architecte et de Brecker son sculpteur, le Führer vient chercher l’inspiration pour la future Germania et saluer Napoléon.

Le 10 mai 1940 l’Allemagne nazie lance avions, chars et artillerie contre la France, les Pays-Bas et la Belgique. La « Blitzkrieg » (guerre éclair), la nouvelle technique de concentration des armes, est payante. Un mois et demi plus tard, le 14 juin, les troupes du Reich entrent dans Paris. Le 22 juin l’armistice est signé dans le wagon de la clairière de Rethondes, là où fut conclu celui de la première guerre mondiale, le 11 novembre 1918. Hitler a un sens aigu du symbole, on le sait. Il le confirme encore le lendemain, le 23 juin, en faisant une visite éclair dans un Paris « astre mort ». Précisément 2h30 entre 6 heures et 8h30 du matin. Du moins le calcule l’écrivain et essayiste, Michel Guénaire en consultant les documents à disposition. Notamment les livres d’Albert Speer, l’architecte d’Adolph Hitler et de son sculpteur, Arno Becker.

Architecture du pouvoir

Hitler embarque ses artistes et quelques dignitaires nazis pour s’imprégner de la ville lumière, de s’en inspirer pour Germania, la future capitale du Troisième Reich. Michel Guénaire reconstitue avec minutie les 2h30 que passe le chef du Reich dans la capitale. Un itinéraire en 7 étapes d’Opéra au Sacré Cœur en passant par la Madelaine, l’Arc de Triomphe, le Trocadéro, Les Invalides, le Panthéon. « C’est la plus beau jour de ma vie » aurait déclaré le Führer.

Il avait étudié Paris en profondeur, il l’admirait la jugeant la plus belle d’Europe. Une sorte de « vénération » qui expliquerait sa bienveillance. Paris est en effet épargnée par les bombes. Une décision qui étonne d’ailleurs l’entourage du Chancelier. Cette « clémence » se justifie sans doute par la convergence des inclinations d’Hitler. Son goût pour l’architecture, lui le recalé des Beaux-Arts. « Il voit de l’Arc de Triomphe, les Champs Élysées, les Tuileries et le Louvre, en enfilade. C’est l’enchaînement des symboles, de la guerre, du pouvoir et des arts » (p 46). Selon Michel Guénaire, Hitler voit dans l’architecture haussmannienne les artères du pouvoir. Le sien, tel qu’il l’envisage à la fin de la Seconde Guerre mondiale dans une capitale où tout sera plus grand qu’ailleurs en Europe. Paris et Vienne notamment. Un Arc de triomphe plus grand. Des Champs-Élysées de 5 km de long au lieu des 2 km parisiens et de près de 60 m de large.

L’art de la propagande

La visite éclair se déroule dans un Paris vidé de ses habitants, hormis ceux des quartiers populaires. Hitler ne peut rien voir de « la bohème »du 14ème arrondissement. Une capitale muette, dans la brume du petit matin. Michel Guénaire sait installer une ambiance. Notamment avec l’image de l’avion qui perce la nuit des Ardennes belges puis la progression des cinq limousines du cortège dans l’aube parisienne. Il décrypte également la propagande à l’œuvre dans la visite éclair. Les photos d’Hitler, de dignitaires nazis, de Speer et de Becker devant la Tour Eiffel sont mondialement connues. Elles sont l’œuvre de Heinrich Hofmann, le portraitiste officiel du régime. Les films, eux, sont la création de Walter Frentz, un « disciple » de la réalisatrice allemande Leni Riefenstahl qui a magnifié les JO de Berlin de 1936. Outre les images du Trocadéro, celles d’un homme en noir entouré d’hommes sombres, on retient également celle d’un l’homme en blanc qui sort des Invalides. La propagande installe l’image d’un Hitler raide, mécanique, toujours droit. Presque inhumain. Presque au-delà de l’homme. De leur côté l’architecture et la sculpture devront imprimer la puissance et la gloire dans la pierre d’une capitale mégalomaniaque.

Hitler « intime »

Dans La visite, Michel Guénaire va au-delà de la propagande. À l’opposé du mythe du surhomme, l’auteur plonge ainsi dans l’intimité du chancelier, explore ses failles, ses traumas. Hitler, qui a fait du loup, son double, son symbole, Hitler qui a étendu « une peau sombre sur l’Empire comme s’il était couvert d’une immense peau de bête » , Hitler qui ne fume pas certes, qui ne boit pas certes, était toxicomane et atteint de la maladie de Parkinson. Cet Hitler intime à la main de pantin, il le raconte notamment à travers les récits de Speer et de Brecker son sculpteur. Les artistes ont la parole et elle n’est pas tendre, surtout celle de Speer.

Dans La visite Michel Guénaire livre un Hitler intime dans les détails d’un séjour éclair peu documenté jusque là. Et, au-delà, en fouillant dans la vie, les blessures, les focus artistiques et les erreurs stratégiques comme l’attaque du front russe. Napoléon, admiré par Hitler s’y était perdu. Le Führer y succombera aussi.

INFOS

La visite

Michel Guénaire

Éditions Grasset

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