Montagnes du Jura : hype detox

Montagnes du Jura : raquettes aux pieds et flocons dans les yeux nous avançons à travers la forêt d’épicéas. Les sapins givrés se trouvent plus bas. Ici la roche, très calcaire, tolère seulement les hêtres, les pins. La neige craque, on s’enfonce, on respire.
On remarque aussi des traces de lynx boréal, marques bleutées au fond de petit trous de poudreuse. Point de cerf, de loup en vue  » Le loup fuit l’homme » rappelle le guide qui enchaîne sur le côté slow des raquettes « C’est une pratique non invasine pour découvrir la flore et la faune et sentir la présence du grand tétras ». Totem du Jura, cet oiseau qui ressemble à un « gros poulet », fait partie des espèces protégées. « On compte seulement 280 spécimen sur le massif jurassien français. L’hiver l’animal ne peut se nourrir que qu’aiguilles de pin » précise le guide. C’est peu ! Résultat de ce jeûne calorique forcé, moins de forces pour fuir un prédateur. Mieux vaut donc le laisser s’alimenter et dormir en paix.

Halte retour au Refuge de la Loge proche du terminal de la télécabine de la Catheline que nous avons prise plus tôt à Lélex. Par beau temps on peut monter en ski ou en raquettes au point culminant du massif : le Crêt de la neige-1720m d’altitude. Ce n’est pas le cas aujourd’hui. On savoure donc une infusion dans l’ambiance roots au refuge : rideaux à petits carreaux, table de bois, plats maisons dont une craquante tarte aux myrtilles, corner cocooning et … odeur de mazout qui monte jusqu’à l’étage dortoir très « rustique » avec son lot de matelas côte à côte. « Nous allons l’aménager » promet le gérant.

Godille, ski de fond, raquettes … des domaines pour chaque public

ski et raquettes dans le jura

Sur la table on déploie les cartes et on parle glisse.
Les montagnes du Jura couvrent deux régions (Bourgogne-France-Comté / Auvergne Rhône-Alpes) et 3 départements (Ain-Jura-Doubs). Le massif en forme de croissant longe la frontière franco-suisse sur 340 km.
Cette « unité géologique » propose, loin du tourisme de masse, 310 km de pistes de ski alpin et 2 500 km de pistes de ski nordiques. Selon « Montagnes du Jura », la neige couvre 14 000 m2 de courbes et de vallées 6 mois par an. L’organisme de promotion précise que les 4 principaux domaines répondent aux attentes spécifiques des visiteurs. Mijoux-La Faucille et Mernthières pour les familles, Lélex-Crozet -riche en neige et en dénivelés- pour les fans de godilles, La Vattay -fort de ses 160 km de bois et pistes damées- pour les fans de ski nordique.

Transjurassienne : le ski à fond

transjurassienne 2019

Si les montagnes du Jura restent une destination discrète, elles ont leur événement snow : La Transjurassienne. Cette année l’événement dédié au ski de fond fêtait ses 40 ans avec 4 000 skieurs essentiellement Français, Suisses, Nordiques. Pour que chacun puisse participer à cette grande fête, les organisateurs ont proposé deux distances en « classique » (25 et 56 km) et 3 distances en « skating » (25, 48 et 68 km -entre Lamoura (Jura) et Mouthe (Doubs- ).

Le Trail 2019 s’est déroulé sous la neige fondue et la pluie les 9 et 10 février. Antoine Auger et Marie Kromer sont sortis vainqueurs. Après,  place à la fête. Certes on est loin de Tomorrowland (Alpe d’Huez)  et ses 30 000 teufeurs attendus sur les pistes pendant trois jours en mars. On est dans un trip plus … « slow ».

Espace des mondes polaires : Immersion dans le grand Nord

Pour rester dans l’esprit nordique on visite « L’espace des mondes polaires ».

Petit morceau d’Arctique et d’Antarctique ouvert en 2017, le centre culturel et sportif (patinoire) de Prémanon (l’un des 4 villages de la station Les Rousses) couvre plus de 5000 m2. Il a été conçu par une entreprise locale après un appel d’offre international. Alors ici, dans le Jura on se hausse du col.
L’Espace des mondes polaires ressemble à un iceberg enterré à 60% dans le sol. Objectif : atteindre, avec l’appui d’autres aménagements, l’autonomie énergétique.
L’hiver, le bâtiment se fond dans le paysage de neige. Ambiance « grand désert blanc » également à l’intérieur. On déambule d’un pôle à l’autre en croisant un ours haut de de 3,3 m, des loup polaires, des manchots … tout le petit et le grand monde des glaces. On peut passer la main dans des « trous surprises » pour deviner le pelage d’animaux. Idéal pour les enfants. Le centre propose par ailleurs des vidéos qui alertent sur les conséquences du changement climatique et en pointent leurs origines. Enfin, on remarque cartes, outils, kayaks de grands explorateurs dont Paul-Émile-Victor qui a passé son enfance dans le Jura.

Détour par les savoirs traditionnels

La Transju l’hiver et les rando l’été sont l’occasion de visiter les villages aux églises couronnées d’un clocher en dôme et de découvrir les savoirs traditionnels locaux.
Au 18e et 19e siècle, les paysans, pour occuper leurs hivers, développent de nouvelles activités : horlogerie, lunetterie, taile de pierres précieuses. On découvre ces artisanats en poussant la porte des nombreux musées spécialisés.

Nous avons visité celui de la boissellerie. On le trouve à Bois-d »Amont -1050 mètres d’altitude- dans une ancienne scierie que sépare deux rives de l’Orbe. L’une rejoint la mer de Nord l’autre la Méditerranée. En cette saison, l »une et l’autre sont couvertes de neige. La rivière sombre coule sous un ciel blanc en harmonie avec les paysages de vallées et de bois.

Au chaud, baignée d’essences d’épicéa, la médiatrice explique, avec un certain talent de comédienne, l’histoire des boites qui ont fait la réputation du village et de la région.

Un peu d’histoire : au milieu du 19e siècle, le village se spécialise dans la fabrication des boîtes à pharmacie, malles et caisses d’horloges. Dans les années 1880, il oriente la production vers des boîtes à fromage. Banco ! En 1929, sur les 1170 habitants que compte la commune, 500 travaillent dans la boissellerie. Le musée sent le bois et le voyage dans le temps à travers les outils que l’on est invité à manier : targeuse, machine à vapeur, turbine actionnant la scie hydraulique, roue à godet.

Comté, tartes, saucisse de morteau ; une gastronomie roborative

For des rousses

La Franche-Comté est le pays du … comté (AOC). Alors pas question de le loger n’importe où.
On le vérifie lors d’une visite au Fort des Rousses.
Ce beau bâtiment tout en voûtes (50 000 m2) et pierres de tailles a originellement été voulu par Napoléon Bonaparte comme une fortification militaire pour sécuriser la frontière Suisse. Achevé sous le Second Empire, il comprend des kilomètres de galeries et s’étend sur 21 ha ce qui en fait la deuxième plus grande forteresse après celle du Mont Valérien.
Le Fort est désormais reconverti en centre administratif et en caves d’affinage détenue par la marque Juraflore (le nom vient du café de Flore).
« Le comté est un fromage de lait cru de vache, à pâte pressée cuite. Une meule de comté pèse 42 kg en moyenne, L’affinage dure entre 8 et 12 mois. Un Français sur deux consomme ce fromage quotidiennement, La région en a produit 65 000 tonnes en 2018, 5% est exporté dans 25 pays d’Europe ». La guide de l’affineur Juraflore balance les chiffres à la vitesse d’un chasse mouches speedé au dessus d’une jatte de lait d’alpage.
Elle nous conduit aussi dans les endroits secrets où mûrissent les meules. On avance dans la pénombre en croisant des trouées d’eau, on lit des inscriptions aux murs, autant de témoignages de la vie antérieure du Fort.
L’affinage est robotisé. Le maître affineur joue un peu de rôle de sommelier. Le spectacle des formages mûrissant dans une lumière dorée est très instagrammable comme d’ailleurs les galeries du Fort et les reconstitutions de la fabrication du comté dans une fruitières.
À retenir : une meule de comte nécessite de collecter le lait de 20 vaches Montbéliardes (vaches de la région) car il faut 450 litres de lait pour une meule. Autre info : fruitière (ou fromagerie) vient de fructifier. C’est le fruit commun du travail des hommes. Afin de respecter le cahier des charges de l’appellation d´origine, les vaches doivent être nourries aux céréales, herbes, foin sur un hectare. Le fromage a ses saisons comme la mode. Le comté de couleur jaune provient de vaches nourries à l’herbe, c’est la version été. Le comte de couleur blanche est tiré de vaches alimentées au foin, c’est une version hiver.

Outre le comté, les montagnes du Jura propose une cuisine qui tient au corps.

Après une sortie ski de fond sur une rivière gelée on refait le plein de calories. Par exemple avec un menu potage aux pois cassés, croûtons, saucisse morteau et canard aux pruneaux et aux petits légumes.
Trop rustique ou calorique ? Optez pour les poissons de rivière – truite, loups, perche- et les champignons (un régal).

Pour la jouer terroir à fond il faut goûter au Mont d’Or. Chose faîte au restaurant Le Manoir des Montagnes, chalet typique qui revisite le « Grenier Fort » jurassien d’antan. Membre des Relais du Silence, l’hôtel situé aux Rousses (complet en 2019) compte 9 chambres et suites. Chacune est unique et se raconte à travers son décor. Celle de Rose en particulier. Rose? « Oui Rose, l’esprit de l’ancienne propriétaire qui veille sur les lieux et les hôtes » raconte avec un mystérieux sourire l’actuel maître des lieux.

Et côté vin ? Il y a les vins du Jura (vins de Bujy par exemple) et avec un dessert ou en digestif le Mac Vin. Non, rien à voir avec la marque à la pomme. On a découvert ce mélange liquoreux de vin et de marc du Jura à La Mainaz.

L’hôtel a une déco design-cosy qui emprunte aux traditions locales ; ski d’époque au dessus du lit, luges en lampadaire …
À 2 min des pistes et du remonte pente, La Mainaz est bien placée pour les sorties en ski. La forêt d’épicéas, et de sapins qui l’entoure en font aussi une bonne base de départ pour les rando.
Et puis il y a la vue. Entre 1 000 et 1 300 m le panorama est superbe sur le col de la Faucille et sur Genève à seulement 20 km.

Et hop on reprend un MacVIn pour mieux savourer la vue !

Léonore Cottrant

Crédits photos : FINELIFE TV et CRC France=Comté

S’informer ?

Les Montagnes du Jura
http://www.montagnes-du-jura.fr

Office du Tourisme Borgogne-Franche-Comté
http://www.bfctourisme.com

Où manger ?

L’atelier
http://www.restaurant-latelier.fr

Chalet du Lac
http://www.restaurant-chaletdulac.com

Où loger ?

Attention : le parc hôtelier est très réduit en établissements de qualité. Nous avons de mauvais souvenirs de lieux bruyants et sans aucun charme.

Hôtel La Mainaz
http://www.lamainaz.com

Le Manoir des Montagnes (complet en 2019)
http://www.manoirdesmontagnes.com/fr

Activités

Espace des mondes polaires
http://www.espacdesmondespolaires.org

Caves d’affinage du Fort des Rousses
http://www.juraflore.com/fr

Musée de la Boissellerie
http://museedelaboissellerie.com/

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