Djinns, soufisme, wifi : croyances et invisible à l’ICI

Djinns, soufisme, wifi : croyances et invisible à l’ICI. L’institut fait et défait l’invisible dans une exposition ensorcelante qui questionne les stéréotypes et montre comment les croyances se nourrissent les unes des autres.

« Selon un adage répandu, il y a en Afrique 50 % de chrétiens 50% de musulmans et 100 % d’animistes » note Bariza Khoari, présidente de l’ICI (Institut des Cultures d’Islam).
Djinns, grigris, vaudou et même un dieu Wifi, l’adage se confirme avec l’exposition « Croyances : faire et défaire l’invisible ».
Une manifestation qui couvre l’ensemble des deux bâtiments, explore 5 thématiques à travers 16 artistes. Objectif : déconstruire les stéréotypes et montrer comment les croyances se nourrissent les unes des autres.

 

Transes : vibrations soufies, exorcisme évangéliste

Comme un sésame aux mystères, une large fresque futuriste et symbolique de Josèfa Ntjam couvre la façade de la rue Léon.

Après cette explosion de couleurs place aux vibrations. Celles des transes soufies capturées par les photos hypnotiques de Bruno Hadjih qui travaille depuis 15 ans sur la branche mystique de l’islam. Les flous et la répétition des noirs restituent la transe, résultat d’un mélange d’incantations, de danses et de mélopées. Impressionnant de beauté et de présence.

Dans un corner, la vidéo de Léonard Pongo capture une autre transe, celle des croyants des églises évangélistes de République Démocratique du Congo. Ici les prêcheurs ne perdent pas la tête et comptent l’argent qui coule à flot.

Djinns, jumeaux et vaudou : scan sociétal

On glisse ensuite des croyances complexes aux rites du « quotidien ».

Collecte méticuleuse de grigris marocains rassemblés dans une sorte de grimoire et photo-montage d’un rituel de fécondité sur fond de caverne platonicienne questionnent le rôle des femmes dans la transmission des croyances. Btihal Remil et Mohammed Laouli scannent les peurs et les maux que la société traditionnelle cherche à soigner pendant que d’autres artistes explorent au Nigéria, la mythologie des jumeaux, êtres intermédiaires, doubles parfois bienfaisants parfois nuisibles.

Vaudou et esclavage

Le vaudou, lui, est appréhendé dans son rapport à l’esclavage local et colonial. Nicola Le Caize incarne son travail sur la mémoire dans une installation qui regroupe divers objets (instruments, bracelets etc) collectés dans une famille du Togo. Il s’agit de se réconcilier avec les esprits dérangés et de les apaiser.

Corps et monothéismes

L’exposition se frotte également aux trois monothéismes.
Après Mohamed Ali ou Malcolm X, Samuel Fosso s’exhibe en un Black pope qui brave le diktats tandis que Kadija in Wonderland, magnifique photo de femme en lévitation au dessus d’un minbar (chaire d’imam), joue les allégories de tableaux religieux.
Et le corps animal dans tout ça ? Nabil Boutros photographie avec malice les bovins, émissaires expiatoires communs à ces religions.

La résistance surgit dans les pèlerinages mourides (1) et la résilience, les rituels qui réparent les blessures, dans les portraits de 10 jeunes filles haoussas enlevées par Boko Haram en 2013.

Décoloniser le numérique : le binaire et la divination des Yorubas

Tabita Rezaire, Franco -Guyanno- Danoise, comme elle se présente, exploite le filon des ethnics studies pour décoloniser la technologie. Dans des vidéos rhizomiques futuristes où elle se met en scène, l’artiste explore les nouvelles pratiques et les nouveaux mondes à travers les technologies. Quel lien avec les croyances ? Et bien, le langage binaire serait issu d’un rituel divinatoire yoruba. Va-t-elle attaquer les Gafam pour appropriation culturelle ?

Dieu ou le wifi

Last but not least, le délirant et hilarant monde de Seumboy VRAINOM :€ où le wifi tout puissant challenge toute autre déité. Vidéos, performances; l’artiste est insatiable On adore !

On garde (presque) tout dans cette expo qui défriche territoires et émotions. Foncez !

(1) mouvement soufi pacifique de résistance à la colonisation française au Sénégal créé par le Cheikh Amadou Bamba

Crédits photos : FineLife TV et ICI -courtesy of the artists

Djinns, soufisme, wifi : croyances et invisible à l’ICI

« Croyances : faire et défaire l’invisible »
ICI (Institut des Cultures d’Islam) Léon
19, rue Léon
75018 Paris
ICI Stephenson
56, rue Stephenson
75018 Paris
https://www.institut-cultures-islam.org
Exposition jusqu’au 27 juillet 2020

Related article Djinns, soufisme, wifi : croyances et invisible à l’ICI

 

https://finelife.tv/fr/2022/05/15/silsila-lexpo-qui-regarde-migrations-et-heritages/

 

Art Paris Art Fair : le printemps africain
https://finelife.tv/fr/2017/06/08/art-paris-art-fair-le-printemps-africain/