Jean Vendome Artiste Joaillier

Jean Vendome Artiste Joaillier l’exposition de l’École des Arts joailliers retrace la carrière singulière d’un pionnier qui voulait sculpter l’émotion des pierres.

« Les joailliers l’appelaient le zinzin. Les artistes le rejetaient car il y avait des gemmes dans ses oeuvres. Jean Vendome a occupé une place à part dans le monde de la création » note Thierry Vendome à propos de son père.
L’École des Arts joailliers retrace cette carrière singulière dans une exposition qui regroupe cent trente pièces issues de collections particulières et publiques comme le Musée des Arts Décoratifs ou encore le Musée des Confluences de Lyon. La rétrospective présente notamment l’épée de l’académicien Roger Caillois et l’iconique collier de sa femme Alena.

Jean Vendome (1930-2017), de son vrai nom Ohan Tuhdarian, débute comme apprenti chez son oncle avant de partir sous les drapeaux. Distingué par la hiérarchie militaire, il étudie le dessin aux Beaux Arts de Paris. Jean Vendome est doué. Il obtient plus tard une bourse qui lui permet de suivre les cours de gemmologie de Georges Göbel et Diane Level au Muséum national d’histoire naturelle.
Les savoirs fusionnent avec les rencontres, Roger Caillois, Jean Cocteau, Paul-Emile Victor … De cette osmose naît la « touch » du créateur. Une marque qu’il imprime pendant près de 67 ans à ses quelques 30 000 bijoux.

L’acte de création s’inscrit dans une rupture initiale, se consolide dans une révélation et se cristallise dans la notion de bijou de caractère.

La genèse est le rejet des codes de la joaillerie avec l’introduction de pierres fines. Jean Vendome est le premier joaillier à monter en bijoux des minéraux naturels.

La révélation arrive quand, incapable de fondre des émaux de Lalique, Jean Vendome « comprend ce qu’est la geste créatif. Un bijou est une oeuvre d’art que l’on ne peut pas refaire car sa valeur réside dans le geste artistique » explique Sophie Lefèvre commissaire de l’exposition.

Le joaillier forge la notion de bijou de caractère. Une pièce unique parfois transformable, ode aux gemmes, indifférente aux modes mais perméable aux courants artistiques et aux personnalités qui marquent les décennies successives.

Jean Vendome Artiste Joaillier : exposition chronologique sur un créateur pionnier

« L’exposition présente une vue d’ensemble des années 50 à 2007 date de la fermeture de la boutique » précise Sophie Lefèvre « Elle suit un ordre chronologique d’où émerge les pièces iconiques ».

Les années 50 rayonnent avec la collection Pépites inspirée par Jean Cocteau.
Jean Vendome allie les pierres à l’or dans le baroque. Par la suite, il met au point une technique de chauffage qui met l’or en fusion.

Le rendu très actuel évoque les accessoires de la collection Paris Fashion Week SS21 de Schiaparelli. Peut-être un hasard. Mais le créateur a collaboré avec la Maison confirme Thierry Vendome.

L’esprit pionnier du joaillier s’incarne aussi dans la Mal-Pavée, une broche de pierres fines (tourmaline et beryls) disposées de manière aléatoire sur fond d’or blanc. Un cadeau pour sa femme Nelly.

« Les années 70 croise une démarche avant-gardiste de changement d’échelle et d’usage et une volonté d’adapter la joaillerie à la femme qui émerge, une femme moderne et libérée » poursuit la commissaire.

La bague S illustre le renouveau joaillier comme la bague ferret qui grimpe sur la main et les Transformables ( bague-pendentif, bague-broche).

L’exposition exhibe des extravagants colliers ruban, ou colliers pince de crabe (le Dormeur 1991)à côté de bijoux coquillage définitivement sensuels. On retrouve le motto : peu importe la matière seul compte l’acte créatif. Pas de tabou ! Yvonne de Gaulle achète des boutons de manchettes en os de dinosaure pour le Général.

Pièces iconiques reflets de courants artistiques

Ces pièces étranges renvoient au surréalisme, au beau bizarre de Baudelaire ou de Nerval.

Mais le champ d’inspiration du joaillier se révèle beaucoup plus vaste. « Le renouveau que Jean Vendome insuffle à la joaillerie est influencé par l’abstraction, la cinétique, le futurisme du rêve spatial, l’architecture urbaine et sa course à la verticalité » note la curatrice.
Les Tours, la bague Ve avenue avec ses les gratte-ciels témoignent de cette passion architecturale et graphique.
Jean Vendome expose aux cotés de Braque puis d’Arman et de Cesar… Vasarely le contacte après la sortie de la bague Ferret. Le lien avec l’art est puissant. »Mon père aimait l’art contemporain comme l’archéologie » se souvient Thierry Vendome « Ses instruments étaient ses pinceaux« .

Pierres et poésie

Si l’orfèvre artiste crée à partir de support variés (tourteau, coquillage), il reste passionné de pierres dont il ne cesse d’explorer les mondes.On le voit courir les bourses de gemmes, des gemmes qu’il montent et protège dans des cages.
Ses préférences vont à l’agate, la tourmaline et le quartz.
Entre les années 80 et 90 il passe des « promenades irréelles » dominées par un jeu entre agates et quartzs fantômes aux « peintures vagabondes » avec des bijoux faits de minéraux aux couleurs de plus en plus fortes.
L’objectif est de « mettre en vie l’écriture des pierres ». « Le quartz rutilé appelle le glissement du regard de relief en dissymétrie » commente Sophie Lefèvre « Il y a un magnifique travail sur la transparence« .

Selon la curatrice « Le rendu des gemmes évoque l’abstraction d’un Hans Hartung ». Mais elle insiste sur le rôle de l’écrivain-académicien Roger Caillois.

Rencontres inspirantes: Cocteau, Cailliois, Paul-Èmile Victor …

Commanditaire, puis ami, Roger Caillions est, comme Jean Vendome, un fou de pierres. On lui doit « La lecture des pierres ». Certaines formules illustrent l’exposition. « Roger Caillois cherche à percer le mystère de l’acte créatif, Jean Vendome qui a quitté l’école à 13 ans, a soif de connaissance » souligne Sophie Lefèvre. Le match est gagnant.

Avec l’explorateur Paul-Émile Victor, le joaillier découvre les mondes polaires. Or blanc, diamants, la collection Boreal aux épures graphiques transpose dans l’univers du bijou la neige et les infinis immaculés.

On retrouve ce côté très abouti, très design dans la ligne Nocturne. Or blanc, diamants toujours mais aussi aigue-marine dessinent un Paris où la lune se reflète sur les pavés luisants de pluie.
« Paris a beaucoup inspiré mon père. Il avait besoin de l’énergie de cette ville » certifie Thierry Vendome.

De l’énergie et de l’émotion on en découvre beaucoup chez Jean Vendome ce joaillier encore peu connu, qui travaillait pour « servir les pierres sans les trahir« .

Jean Vendome Artiste Joaillier
École des Arts joailliers
31 rue Danielle Casanova,
75001 Paris.
Entrée gratuite sur réservation du mardi au samedi, de 13h à 19h.
Exposition du 8 octobre au 18 décembre 2020

https://www.lecolevancleefarpels.com/fr/fr/jean-vendome-artiste-joaillier

Thierry Vendome, joaillier-créateur et fils de Jean Vendome
http://thierryvendome.com/

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